Mais où est donc passé le (vrai) maire de Nice ?

Qu’est devenu le maire de Nice Philippe Pradal ? Notre journaliste Emmanuel Berretta s’en inquiétait le 16 juillet en postant un message en forme d’avis de recherche sur Twitter.

On est toujours sans nouvelle du maire de #Nice, Philippe Pradal. Disparu du paysage sous le phénomène « éclipse Estrosi » #avisderecherche

— emmanuel berretta (@Eberretta) 16 juillet 2016

Christian Estrosi a été maire de Nice de 2008 à 2016, année où il est élu président de la région Paca et est donc rattrapé par la loi sur le cumul des mandats. Il démissionne et laisse son fauteuil de maire à son premier adjoint, Philippe Pradal. Ce Niçois pur jus est entré en politique sur la liste de Christian Estrosi et a été au conseil municipal. Il est également devenu, par la même occasion, secrétaire général de l’association des amis du maire. Un fidèle donc, qualifié par Nice-Matin, au moment de son intronisation à la mairie, d’« homme de l’ombre, discret, besogneux. Un calme pendant la tempête ».

FRANCE-ATTACKS-NICE © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT FRANCE-ATTACKS-NICE © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT
French Interior Minister Bernard Cazeneuve (C) arrives to speak to the media next to Mayor of Nice Philippe Pradal (L) in Nice early on July 15, 2016 as he visits the area where a truck ploughed into a crowd of people during Bastille Day celebrations. / AFP PHOTO / ANNE-CHRISTINE POUJOULAT © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT

La tempête c’était le 14 Juillet sur la promenade des Anglais. Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’« homme calme » est en effet très « discret ». Il apparaît en première ligne aux côtés de Bernard Cazeneuve et d’Adolphe Colrat, le préfet des Alpes-Maritimes. Mais cette nuit tragique et les jours suivants, le maire ne pipe mot. Silence médiatique. C’est son premier adjoint et mentor Christian Estrosi qui occupera la scène médiatique et alimentera la polémique sur les défaillances de l’État, selon lui, dans le dispositif de sécurité du feu d’artifice.

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Il faut dire que l’ancien maire a fait de la sécurité la priorité de ses mandats, que sa ville est la plus vidéosurveillée de France. Mais les 1 250 caméras disséminées dans la ville devaient permettre à Estrosi d’affirmer au Point que les soixante-quatre policiers annoncés par l’État pour sécuriser la promenade n’étaient pas au rendez-vous. Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve lui répondait ce mercredi matin dans une interview au Monde. « Nous avons reconstitué la liste de tous les policiers nationaux qui étaient sur le terrain à partir des mains courantes attestant de leur engagement. Ils étaient quatre-vingt-cinq à 19 heures, quatre-vingt-neuf à 20 heures, quatre-vingt-douze à 21 heures et soixante-quatre entre 22 heures et 23 heures. Je tiens ce tableau récapitulatif des présences à la disposition de la justice. »

Bon, mais Philippe Pradal ? N’a-t-il rien à dire ? La réponse est dans Le Canard enchaîné, repérée par Le Lab d’Europe 1. Pradal n’a rien à dire, car, selon des propos qu’il a tenus à un de ses administrés, « c’est simple, je fais ce qu’Estrosi me demande. Et il ne me demande rien ». Il suffisait de demander.

Attentat de Nice : Estrosi en fait-il trop ?

Quelle mouche a donc piqué Christian Estrosi pour attaquer ainsi bille en tête les carences du gouvernement sur la sécurité, quelques heures seulement après l’attentat qui a frappé Nice ? Y voir une réaction émotionnelle du patron de la métropole azuréenne au drame qui a touché sa ville chérie, une défausse de responsabilité, une polémique politicienne, voire un positionnement tactique en vue de l’élection présidentielle, est un peu court.

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Car le contentieux est bien antérieur à ce tragique 14 juillet. Il y a un an, presque jour pour jour, l’édile, dans ces colonnes, se plaignait déjà que l’État rogne des effectifs en matière de police et menaçait de faire appel à des vigiles privés. Ce qu’il a fait pour protéger la fan-zone de l’Euro, la ville de Nice ayant recouru à 124 agents de sécurité privée, installé à ses frais des portiques et dix caméras supplémentaires, bref, investi au total 1,2 million d’euros – près de la moitié du budget qu’elle allouait à la compétition – sur ce poste.

Pommes de discorde

Christian Estrosi et le préfet des Alpes-Maritimes, Adolphe Colrat, sont engagés dans un bras de fer qui dure. Il y a un mois et demi, dans un entretien qu’il nous avait accordé pour un numéro spécial Nice du Point, le premier ne mâchait pas ses mots contre le second, coupable à ses yeux d’être « favorable à l’ouverture d’un lieu de culte au bénéfice d’une mouvance salafiste [la mosquée En-Nour, NDLR]. Soit M. Valls accepte que son préfet ne respecte pas ce qu’il a affirmé, qui plus est en état d’urgence, précisait Christian Estrosi, soit le préfet exécute les instructions du gouvernement à l’encontre de l’intégrité du territoire national et de notre région. »

Objet du litige : l’installation de la mosquée En-Nour, contre laquelle bataille la municipalité, arguant du fait que ce bâtiment – que la ville veut transformer en crèche – est propriété du ministre saoudien des Affaires islamiques. Le président de la métropole niçoise a proposé l’ouverture d’un autre lieu de culte, mais le préfet a autorisé la mosquée En-Nour, et le Conseil d’État a tranché en sa faveur.

Ce n’est pas le seul litige qui oppose les deux hommes. Le baron niçois avait même demandé en octobre, lors des Rencontres de la sécurité sur la promenade des Anglais – propos rapportés par Nice-Matin – et sur Twitter, la tête du préfet, parce que celui-ci avait vertement critiqué sa gestion des rythmes scolaires. « Je ne suis pas en guerre contre le préfet, nous précisait Christian Estrosi en juin dernier. Je suis dans un rapport de force avec un gouvernement qui fait le contraire de ce qu’il dit. »

L’enjeu de la sécurité pour contrer le FN

Une opposition musclée qui s’est exprimée récemment aussi avec le logiciel de reconnaissance faciale mis au point par la métropole niçoise, et garantissant, selon son patron, qu’« aucune personne fichée S ne pourra circuler dans Nice sans être identifiée et neutralisée ». Le gouvernement n’a pas donné suite. « Je suis déçu par cette attitude peu responsable », lâchait Christian Estrosi au Point en juin.

L’homme, qui a fait de la sécurité un axe fort de sa politique, a toujours été un ardent promoteur des polices municipales. Celui qui est, par ailleurs, président de la commission consultative des polices municipales – auprès du ministre de l’Intérieur – se démène depuis longtemps pour accroître les moyens d’action de ces agents, notamment l’autorisation de leur armement. Il a fait de Nice une ville en pointe en la matière, ne cessant d’augmenter les effectifs des policiers et les dotant des équipements les plus modernes, en premier lieu un « centre de supervision urbaine » ultramoderne, pilotant 24 heures sur 24 les 1 250 caméras qui font de Nice la ville la plus vidéosurveillée de France. Et le politique n’a jamais hésité à faire des déclarations musclées sur le sujet.

Sur un territoire où le FN – dont des responsables ex-Identitaires – est en progression constante, les élections les unes après les autres se jouent sur cet enjeu. Et celui-ci, évidemment, après l’attentat du 14 juillet, structurera plus que jamais la vie locale et les scrutins, dans les prochaines semaines. Avec, au coeur du débat, des communautarismes exacerbés. En toile de fond, la bataille politique, à la lisibilité simple, entre un territoire de droite et un gouvernement de gauche, sans oublier le match picrocholin entre une grande métropole régionale – rattachée récemment (1860) à la France – et la capitale jacobine du pays. Et en ligne de mire, l’élection présidentielle de 2017.

Fenech : « Sous prétexte d’unité nationale, on esquive les vraies questions »

Le Point.fr : Considérez-vous qu’il y a eu un véritable manque de sécurité lors du feu d’artifice de Nice ?

Georges Fenech : Pour l’instant, il serait prématuré de se faire une idée précise. Concernant l’individu, on ne pourra jamais anticiper un acte isolé et spontané. Mais la question que je me pose, comme tout le monde d’ailleurs, c’est comment ce semi-remorque a pu pénétrer dans cette zone piétonne. C’est invraisemblable. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas eu plus de protection, car les barrières ne suffisent pas, on le sait très bien. Christian Estrosi a également pointé du doigt la faiblesse du système policier.

Si Christian Estrosi avait des doutes sur la sécurité mise en place, aurait-il mieux valu annuler l’événement ?

Non, je ne pense pas qu’il fallait annuler. Malgré les menaces, on n’a pas annulé les fan-zones ou le feu d’artifice à Paris du 14 Juillet.

En période d’état d’urgence, les grands événements comme ceux-là sont-ils souhaitables ?

Moi, j’étais plutôt pour l’interdiction de grandes fan-zones comme celles de Paris. On a pris beaucoup de risques. Heureusement, tout s’est bien passé. Mais nous savons très bien que les menaces sont toujours là. Il ne faut malheureusement pas croire que Nice sonne la fin des attentats. Il y en aura d’autres. Il faut véritablement prévoir des protections plus efficaces que celles qui ont été utilisées à Nice, c’est certain.

L’état d’urgence n’a plus d’intérêt, il ne nous protège plus

Vendredi soir, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve se sont contredits à propos de l’assaillant…

(Il coupe.) C’est pour cela qu’il faut être prudent quand on parle sur ce sujet. Tant que l’on n’a pas les résultats de l’exploitation de tout ce qui a été saisi à son domicile, il faut rester prudent. Je ne veux pas enfoncer le clou, la situation est difficile. Bernard Cazeneuve doit avoir moins d’informations, ou plus de prudence, que Manuel Valls. Évidemment, il vaut mieux parler d’une seule voix au sein du gouvernement, mais il ne faut pas en faire un plat.

Vous paraissez plus tempéré que certains de vos collègues de droite qui n’ont pas attendu bien longtemps après le drame pour s’en prendre au gouvernement… N’y avait-il pas là un manque de décence ?

Écoutez… Tout le monde a été extrêmement choqué par cet attentat d’un nouveau genre, qui est un carnage innommable. Les responsables politiques sont des hommes, et il y a un moment où l’on peut sortir un peu de ses gonds. Mais, oui, évidemment, ils doivent mesurer leur parole.

Cela dit, le gouvernement ne peut pas échapper à une critique. Ils sont dans le « bis repetita ». Le pouvoir nous sort exactement les mêmes réponses que le 16 novembre devant le Congrès : « état d’urgence », « force Sentinelle » et « accélération des frappes ». C’est bien la preuve que l’on est au bout du bout, qu’il n’y a plus aucune offre politique pour lutter contre le terrorisme. Par exemple, même si je le revoterai, l’état d’urgence n’a plus d’intérêt, il ne nous protège plus. Les perquisitions ne donneront pas plus que ce qu’elles ont donné jusqu’à maintenant… On ne lutte pas contre le terrorisme en faisant du flagrant délit, ce n’est pas vrai. Le travail doit se faire en profondeur.

Certains, comme Frédéric Lefebvre, préconisent même l’état de siège…

Non, non, mais après, on peut se lancer dans toutes les surenchères que l’on voudra, ça ne fera jamais avancer les solutions. Il vaut mieux en appeler au courage politique d’imposer des réformes absolument souhaitables. Non, il faut arrêter l’état d’urgence. Même la force Sentinelle n’a pas vocation à durer dans le temps.

Nos dispositifs doivent changer de nature, car nous ne sommes plus dans les schémas des années 80 où le terrorisme était localisé, identifié, revendiqué.

Vous avez déclaré qu’il fallait « tout revoir dans la lutte contre le terrorisme ». Qu’entendez-vous par là ?

Quand je dis cela, certains, comme Cambadélis, m’accusent de faire de la récupération sur le dos des victimes. Moi, j’ai plutôt le sentiment qu’on essaye d’esquiver de vraies questions, aussi sur le dos des victimes, sous prétexte d’unité nationale. J’ai l’impression qu’on veut bâillonner tous ceux qui ont des idées, et notamment ceux qui ont travaillé dans cette commission d’enquête pendant cinq mois. Il n’y a plus de débat. C’est la raison pour laquelle je dis qu’on est dans une forme de chute des responsabilités alors que l’on va aller vers plus d’attentats et plus de victimes.

Pendant cinq mois, nous avons réalisé une enquête très approfondie, avec l’audition des responsables de tous les services français et aussi européens. Nous avons rencontré nos homologues du renseignement à Ankara, à Athènes, à Bruxelles, à Tel-Aviv, à Washington… Nous sommes désormais convaincus que nos dispositifs doivent changer de nature, car nous ne sommes plus dans les schémas des années 80 où le terrorisme était localisé, identifié, revendiqué.

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Vous semblez préconiser un véritable changement de paradigme ?

C’est évident. Il faut voir la réalité en face : nous avons des services qui ont des cultures remontant aux brigades du Tigre ! Nous ne sommes pas encore entrés dans le XXIe siècle. On n’ose pas toucher à l’existant, parce que cela heurte des prés carrés, cela heurte des cultures bien ancrées depuis toujours. C’est ce que nous dit Bernard Cazeneuve : il faudrait stabiliser l’état des réformes parce que nos services ne supporteraient pas un grand soir. Je suis désolé, mais ce sont quand même les représentants légitimement élus qui doivent impulser des réformes et qui doivent les imposer aux administrations. Voire changer les hommes à leur tête si ça ne suit pas derrière. Pendant ce temps-là, on a en face de nous des terroristes, des mafieux, des organisations du crime organisé qui se jouent totalement de nos faiblesses.

Quelles propositions faites-vous alors pour moderniser le logiciel ?

Nous avons mis la barre haut dans nos 40 propositions, car, avec Sébastien Pietrasanta, nous avons vite compris qu’il n’y avait plus d’autres alternatives. Nous devrions, par exemple, nous inspirer de ce qu’ont fait les États-Unis après le 11 septembre 2001 et commencer une restructuration en profondeur des services de renseignements. En France, ils détiennent chacun une partie des informations. Il y a, certes, des partages, mais ce que l’on demande, c’est une coordination au niveau du chef de l’État. Le ministre de l’Intérieur n’a pas autorité sur ses collègues les ministres de la Défense et du Budget… Nous demandons donc un véritable directeur national du renseignement avec une triple mission : le partage des informations, être capable d’analyser le niveau de la menace et être en capacité de mener une véritable stratégie de contre-terrorisme. Et, bien sûr, il faut aussi une base commune européenne : il est absolument nécessaire qu’Europol monte en puissance.

L’enquête de la commission n’a, semble-t-il, pas convaincu le ministre de l’Intérieur…

Nous avons l’impression que le pouvoir s’en contrefiche. Dès la publication de nos propositions, Bernard Cazeneuve nous a envoyés dans les cordes à l’Assemblée en parlant de nos mesures comme étant du « plum pudding », alors qu’il n’avait pas parcouru le dossier. Sébastien Pietrasanta, qui l’avait interrogé, s’est pris cela en pleine figure et l’a très mal pris. Le lendemain, Bernard Cazeneuve nous a reçus au petit déjeuner dans un souci d’apaisement, mais il a rejeté toute idée de réforme un tant soit peu profonde du système de renseignement. Il nous a même dit, avec une pointe d’humour, ou plutôt d’ironie : « Je souhaite bien du plaisir à mon successeur s’il veut se lancer dans cette aventure. » À partir de là, il n’y a plus de dialogue possible puisqu’on nous fait comprendre que c’est irréaliste et infaisable.

Le coiffeur de Hollande défrise les internautes

Depuis la publication par LeCanard enchaîné de la fiche de paie du coiffeur de François Hollande, les internautes s’en donnent à cœur joie. Rebaptisée promptement « CoiffeurGate », l’affaire truste le top des tendances sur Twitter depuis le début de la journée. Petit rappel des faits, Olivier B., coiffeur personnel de François Hollande à l’Élysée, touche 9 895 euros brut mensuels, soit autant qu’un ministre. Certes, ce dernier doit en contrepartie être totalement disponible, à toute heure du jour ou de la nuit. Mais cela fait tout de même cher le coup de peigne. Les réactions ont donc fusé. Festival.

Première tendance : les adeptes des jeux de mots. Sur le sujet, les possibilités sont nombreuses, et anonymes comme célébrités s’y sont risqués avec plus ou moins de bonheur.

#CoiffeurGate Un coiffeur à 10 000 euros, c’est le coup d’état permanente !

— lettotal (@lettotal) 13 juillet 2016

Les Français ne peuvent plus voir François Hollande en teinture. #CoiffeurGate

— Guillaume Meurice (@GMeurice) 13 juillet 2016

C’était donc ça la raie publique exemplaire ?#CoiffeurGatepic.twitter.com/PgCLcgaa63

— Karl Lactaire (@KarlLactaire) 13 juillet 2016

Deuxième tendance : ceux qui jugent qu’ils n’en ont pas eu pour leur argent…

On a vraiment dépensé 504 645€ pour ça @fhollande#CoiffeurGatepic.twitter.com/Vs1apQv1Ot

— Widad.K (@widadk) 13 juillet 2016

… Et qui, à ce prix-là, font quelques suggestions.

Quand tu demandes légèrement dégarni sur les cotés #CoiffeurGatepic.twitter.com/wJKoflk0fD

— Montreux Comedy (@MontreuxComedy) 13 juillet 2016

Si encore son coiffeur lui faisait une coupe sympa… #CoiffeurGatepic.twitter.com/TcSBZZsB6K

— Caillou Bijou (@HibouChouGenou) 13 juillet 2016

Enfin, il y a ceux qui rappellent que Hollande en la matière n’a rien inventé.

Petit rappel bien dégagé derrière les oreilles aux élus LR tentés d’en faire trop avec le #CoiffeurGate de FH.. pic.twitter.com/alnVfr092F

— Guillaume Blardone (@gblardone) 13 juillet 2016

Et ceux qui voient là une excellente raison de voter… Juppé !

«Le coiffeur de #Hollande est payé

9 895 euros par mois. Votez Juppé ! » #coiffeurGate

— C’est dit ! (@LecteursVDN) 13 juillet 2016

Emmanuel Macron avance vers 2017

Il n’est toujours pas officiellement candidat, pourtant Emmanuel Macron semblait bien être en campagne à la Mutualité (Paris) face à une salle comble. Mardi, lors du premier meeting de son mouvement En Marche! le ministre de l’Economie a assuré vouloir porter son mouvement « jusqu’à 2017 et jusqu’à la victoire ». « A partir de ce soir, nous devons être ce que nous sommes, c’est-à-dire le mouvement de l’espoir », a lancé Emmanuel Macron devant 3 000 militants et sympathisants réunis à la Mutualité. Ce mouvement, « nous le porterons ensemble jusqu’à 2017 et jusqu’à la victoire », a-t-il ajouté. Sommé ces derniers jours de clarifier sa position au sein du gouvernement, il ne s’est toutefois pas déclaré officiellement candidat à la présidentielle: « nous ne sommes candidats qu’à une chose, c’est porter un programme, c’est porter une vision, c’est changer le pays ».

Par ailleurs, il a assuré « être de gauche », tout en appelant à « dépasser les clivages » pour « créer un mouvement qui rassemble ». « Je suis de gauche, c’est mon histoire, c’est ma famille », a affirmé Emmanuel Macron en rendant un hommage à Michel Rocard, décédé début juillet, en présence de l’épouse de l’ancien Premier ministre socialiste. L’évocation de la figure de Michel Rocard a provoqué une ovation debout de l’assistance. « Une soirée comme ce soir, je peux pas ne pas penser » à lui, a souligné Emmanuel Macron, tout en se défendant de vouloir le « récupérer ». « On ne récupère pas Rocard, des gens ont essayé de son vivant ils n’ont pas réussi, bon courage pour le faire maintenant », a-t-il lancé, alors que le Premier ministre Manuel Valls a multiplié les hommages et s’est redit « rocardien » après le décès de l’ancien Premier ministre.

Il remercie François Hollande

Selon le fondateur du mouvement En Marche!, « il ne s’agit pas de dire qu’il n’y a pas de différence entre la gauche et la droite ». Mais « nous devons dépasser ce clivage, nous devons aller plus loin. Non pas pour former un nouveau parti » mais pour créer « un mouvement qui rassemble », a-t-il lancé. Il a remercié François Hollande de l’avoir nommé ministre de l’Economie, lors du premier meeting de son mouvement En marche!, alors qu’il venait d’être la cible d’une charge de Manuel Valls. « Le président de la République m’a fait confiance et je ne l’en remercierai jamais assez », a lancé le jeune ministre devant une salle comble à la Mutualité à Paris, sans faire aucune référence au Premier ministre. François Hollande « m’a fait confiance parce qu’il pensait que je pouvais faire quelque chose, (…) parce que j’aime mon pays, que je voulais agir », a-t-il poursuivi.

« Je ne veux pas d’une mode qui (…) consisterait à dire du mal du gouvernement ou du président de la République, ce n’est pas ma crémerie! » a-t-il encore assuré. Il a toutefois exprimé quelques critiques voilées, en parlant d’un pays « usé des promesses non tenues » et usé « de l’entre chien et loup ». « Ce que nous sommes en train de faire, c’est commencer à écrire une nouvelle histoire », a-t-il dit, saluant les élus venus le soutenir, qui ont « pris un risque parce que nous ne sommes pas toujours bien vus des partis ». « Alors cette histoire, elle dérange aussi. Ah oui! J’en sais quelque chose! » a-t-il lancé, sans toutefois aller jusqu’à nommer ces adversaires. « Ca va être dur demain, après-demain. Il y a aura de la pluie, des quolibets, des gens s’interrogeront sur nos capacités, notre volonté d’aller jusqu’au bout, mais rien ne doit nous arrêter », a-t-il poursuivi. A deux jours de l’allocution de François Hollande le 14 juillet et à neuf mois de la présidentielle, Emmanuel Macron réunissait son mouvement politique. Un premier grand meeting du ministre qui a suscité l’agacement profond de Manuel Valls: « Il est temps que tout cela s’arrête », a-t-il tonné mardi après-midi. Le Premier ministre avait déjà affirmé fin avril que c’était au président de la République de trancher sur le cas d’Emmanuel Macron.

Plaidoyer pour la laïcité

Le ministre a de nouveau marqué sa différence avec Manuel Valls en se disant défavorable à l’interdiction du voile à l’université proposée par le Premier ministre. « Je ne crois pas pour ma part qu’il faille inventer de nouveaux textes, de nouvelles lois, de nouvelles normes, pour aller chasser le voile à l’université, pour aller traquer ceux qui lors des sorties scolaires peuvent avoir des signes religieux », a-t-il dit. Mi-avril, dans un entretien à Libération, Manuel Valls s’était dit favorable à une interdiction du voile à l’université, en jugeant qu' »il faudrait le faire ».

Dans un volet de son discours où il s’est attardé sur la laïcité et l’identité française, deux thèmes chers à Manuel Valls, Emmanuel Macron a défendu des règles « qui sont claires: toutes les religions se conforment aux règles de la République ». « Dans notre République, il n’y a pas d’inégalités entre les hommes et les femmes. Dans notre République, il y a des règles, et elles doivent être acceptées par tous », a-t-il poursuivi. « Nous avons un ennemi, une menace, Daech (l’organisation Etat islamique), mais cela, ce n’est pas l’islam », a dit Emmanuel Macron, dans une nouvelle prise de distance avec le Premier ministre qui avait désigné « l’islamisme radical » comme « ennemi ». « La laïcité ce n’est pas un mot daté, ce n’est pas un mot ringard, elle protège des identités fermées, elle permet de veiller à ce que nul ne soit assigné à résidence par son identité et sa religion », a encore déclaré Emmanuel Macron.

Selon un sondage Odoxa pour Le Parisien publié mardi, 36% des Français souhaitent que l’ex-protégé du président se présente (30% chez les sympathisants de gauche, 53% de droite) contre 14% pour le président Hollande et 26% pour Manuel Valls.

Coignard – Écologistes : primaire dans une cabine téléphonique

Le retrait de Nicolas Hulot de la course à la présidentielle, mardi 5 juillet, a rouvert la boîte à gifles au sein d’Europe Écologie-Les Verts. Depuis le début de l’année, celle-ci a pourtant déjà beaucoup fonctionné. Le parti a perdu son groupe parlementaire à l’Assemblée nationale, où ses élus siègent désormais comme non-inscrits. La propulsion de sa secrétaire nationale, Emmanuelle Cosse, au ministère du Logement ranime les vieilles querelles. Alors que celle-ci assure ne pas vouloir choisir entre le parti et le ministère, EELV la raye de la liste de ses adhérents quelques jours après sa…

Woerth sur Hollande : un joueur de foot « plutôt médiocre »

Un jour de demi-finale France-Allemagne, même les politiques parlent football. Résultat, ce jeudi matin, Éric Woerth interrogé par Public Sénat et Sud Radio s’est laissé aller à quelques confidences sur son niveau de football, mais sans oublier de tacler au passage, le président de la République. « Au fond, le président n’est pas rentré dans le costume de président, et puis il n’est pas rentré dans le costume de footballeur non plus. J’ai joué au football avec lui, contre le Variétés. Y’avait une équipe de l’Assemblée… Avant qu’il soit président ! » a déclaré l’ancien ministre du Budget. « Un bon joueur ? » renchérit alors Public Sénat, repris par le Lab : « Non, ‘fin pas meilleur que moi en tout cas, donc plutôt médiocre. Mais plutôt sympathique… Et donc, on a fait un jour un match contre le Varietés pour une association », a répliqué Éric Woerth.

François Hollande, ancien joueur du FC Rouen

Le président de la République, fan de football, est pourtant un ancien joueur dans les catégories minimes et cadets du FC Rouen dont il est resté supporteur. En février dernier, alors qu’il faisait une tournée en Amérique du Sud, le président s’était d’ailleurs essayé à quelques passes en présence de David Trezeguet, d’origine argentine. Sa prestation avait fait le buzz sur Internet, puisqu’il avait réussi à marquer un but… dans des cages vides. Une anecdote qui avait beaucoup amusé les réseaux sociaux.

À défaut d’être un bon joueur, le président, toujours présent lors des matches de l’équipe de France, répondra en tout cas à l’appel des tribunes ce jeudi, pour la demi-finale de l’Euro 2016 qui oppose la France à l’Allemagne.

Le conseil de VGE à Emmanuel Macron

Ce mardi, l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing a conseillé à Emmanuel Macron d’acquérir de « l’expérience » et de mener une longue carrière de ministre avant de se lancer éventuellement dans une campagne présidentielle. Le slogan « Place aux jeunes » est « justifié, mais doit être complété », explique l’ancien chef de l’État dans un entretien accordé à Yahoo! et Sciences Po TV. Pour lui, le slogan devrait plutôt être « Place aux jeunes compétents! ».

Macron lui ressemble « probablement un peu »

Emmanuel Macron ou Bruno Le Maire, candidat à la primaire de la droite, « il faut qu’ils aient fait le parcours qui les prépare » à l’élection présidentielle, ajoute celui qui a été élu président de la République à 48 ans. « On ne peut pas être président de la République sans avoir été ministre sur une période assez longue », estime-t-il. François Hollande a pourtant été élu sans jamais avoir été ministre. Même si Emmanuel Macron lui ressemble « probablement un peu », il lui « manque d’avoir géré », souligne Valéry Giscard d’Estaing, rappelant avoir « géré les finances de la France pendant neuf ans » avant d’être élu président en 1974. « Il faut d’abord qu’ils (les jeunes) aient acquis l’expérience du pouvoir », conclut VGE.

Blanchiment de fraude fiscale : Serge Dassault absent de son propre procès

À l’ouverture du procès de Serge Dassault, poursuivi pour blanchiment de fraude fiscale sur des comptes cachés à l’étranger, ses avocats ont soulevé lundi plusieurs questions de procédure, susceptibles d’entraîner un report du procès du sénateur (LR) de 91 ans. Le tribunal correctionnel de Paris y répondra mercredi matin. Serge Dassault n’était pas présent à l’audience lundi.

Le parquet national financier (PNF) reproche au PDG du groupe Dassault, fondé par son père Marcel, d’avoir détenu des comptes à l’étranger pour dissimuler le produit direct de sa propre fraude fiscale. En cause, quatre comptes de fondations et de sociétés, aux îles Vierges britanniques, au Luxembourg et au Liechtenstein, qui ont abrité jusqu’à 31 millions d’euros en 2006.

Premier à prendre la parole pour Serge Dassault, Me François Artuphel a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le blanchiment de fraude fiscale. « On ne peut pas être poursuivi pour blanchiment si la fraude fiscale, en amont, n’est pas démontrée », a-t-il plaidé. Me Jacqueline Laffont a, quant à elle, soulevé une autre QPC, portant cette fois sur le régime des perquisitions dans les études notariales.

Le notaire historique de Serge Dassault avait été perquisitionné en février 2015 dans le cadre de cette enquête. Se pose, selon Me Laffont, la question de savoir s’il est conforme à la Constitution de procéder à de telles perquisitions sans la « présence active » d’un représentant de la profession et l’absence de recours effectif.

« Doute sérieux »

Le parquet national financier a demandé au tribunal de rejeter l’une et l’autre de ces QPC. Pour la première, car le blanchiment est un « délit distinct qui comprend une intention coupable différente ». Pour la seconde, notamment car « les droits de la défense ne sont en cause que chez l’avocat, pas chez le notaire ».

Serge Dassault est également jugé pour avoir omis de déclarer 11 millions d’euros en 2014 et 16 millions d’euros en 2011 à l’ancêtre de la HATVP, la Commission pour la transparence financière de la vie publique, chargée de vérifier les situations patrimoniales des élus. La HATVP avait émis un « doute sérieux » sur « l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité » de ses déclarations, le soupçonnant d’avoir omis de déclarer des avoirs détenus à l’étranger. Serge Dassault a depuis régularisé sa situation, tant auprès de l’administration fiscale que de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), selon une source proche de l’enquête.

Système d’achat de voix

L’existence de « cagnottes » au Luxembourg et au Liechtenstein avait déjà été évoquée dans le cadre de l’enquête sur un système présumé d’achats de voix lors des campagnes municipales de Corbeil-Essonnes (Essonne) en 2009 et 2010. Une enquête dans laquelle Serge Dassault est mis en examen avec sept autres personnes, dont l’actuel maire, Jean-Pierre Bechter (Les Républicains), qui lui a succédé à la tête de la ville.

Dans l’enquête menée par les juges d’instruction, plusieurs témoignages accréditent un système d’achat de voix. Les magistrats ont aussi saisi à la résidence et au QG politique de Serge Dassault des listes d’électeurs avec les mentions « payé » et « non payé » et des annotations (« permis de conduire », « soutien sortie détention »…), formules tendant à accréditer cette pratique frauduleuse.

L’industriel est mis en examen pour achat de votes, complicité de financement illicite de campagne et financement en dépassement du plafond autorisé. Il ne nie pas les dons d’argent, mais conteste toute corruption et tout lien avec les élections. L’affaire est toujours en cours d’instruction.

Loi travail : l’utilisation du 49.3 se précise

Le recours au 49.3 était dans tous les esprits jeudi, alors que les députés ont modifié en commission le projet de loi travail comme proposé par le gouvernement pour renforcer le rôle des branches. La commission des Affaires sociales a adopté les trois amendements du gouvernement présentés mercredi, afin de « mieux associer les partenaires sociaux et conforter le rôle des branches professionnelles », selon la ministre du Travail, Myriam El Khomri.

Contrairement à ce qui s’était passé en première lecture en avril, la ministre s’est invitée brièvement à cette réunion de députés, reconnaissant « une entorse au fonctionnement de cette commission » présidée par Catherine Lemorton (PS). Quelques opposants au texte dont des frondeurs PS, parfois non membres de la commission, sont aussi venus défendre, en vain, des amendements notamment au très contesté article 2 sur l’aménagement du temps de travail par accord d’entreprise, alors que l’examen dans l’hémicycle à partir de mardi pourrait tourner court si le gouvernement décide de recourir à nouveau au 49.3 pour faire adopter le projet de loi sans vote.

« Que fait-on ici ? »

Dans un parallèle avec l’Euro, Catherine Lemorton a invité à jouer « un match après l’autre » : le rôle de la commission est important « si vraiment vous redoutez un 49.3 », car s’il « tombe sur le texte », c’est avec « toutes les modifications en commission », a-t-elle insisté. Elle a en outre déploré le peu de députés de l’opposition présents et « le cirque que certains et certaines vont faire mardi dans l’hémicycle ».

Mais, a demandé Gérard Cherpion (LR), « que fait-on ici » alors que « le gouvernement continue de négocier avec les partenaires sociaux ? ». Sa collègue Isabelle Le Callennec (LR), s’est aussi interrogée sur tout « travail utile » de la commission, après l’annonce par François Hollande d’un nouveau 49.3 si nécessaire. « Si vous pouviez nous dire à quel moment vous allez dégainer le 49.3, ça nous ferait gagner du temps », a lancé le centriste Arnaud Richard à Myriam El Khomri.

Les partenaires sociaux « entendus »

La ministre a défendu elle-même son amendement visant à « placer les partenaires sociaux au centre des travaux de refondation du Code du travail », objet de l’article 1. Le Haut Conseil du dialogue social sera ainsi associé. Dans l’après-midi, c’est la secrétaire d’État Clotilde Valter qui a présenté les deux autres amendements du gouvernement, sur l’article 13, destinés à renforcer et clarifier le rôle des branches. « Nous avons écouté et entendu les partenaires sociaux et les parlementaires », a assuré Clotilde Valter.

Le premier amendement prévoit une négociation au sein de chaque branche pour définir les thèmes sur lesquels les accords d’entreprise ne pourront pas être moins favorables que les accords de branche (hors les cas où la loi prévoit la primauté de l’accord d’entreprise). Le second ajoute deux domaines où l’entreprise ne pourra pas faire moins bien que la branche : l’égalité professionnelle et la pénibilité.

« On change l’article 2 de nature »

Isabelle Le Callennec a jugé que par ces dernières modifications « on change l’article 2 de nature » et « on a vidé le peu d’avantages qu’il y avait à cette loi ». Mais selon l’oratrice des socialistes, Monique Iborra, le gouvernement a simplement « précisé ce qui était déjà dans la loi mais n’était entendu par personne ». À plusieurs reprises, le rapporteur Christophe Sirugue (PS), qui avait déposé les mêmes amendements que le gouvernement, a appelé ses collègues à ne pas voir que des « risques » dans ce texte.

Sur le fond, les députés ont pour l’essentiel rétabli leur version, après la réécriture opérée au Sénat, qui avait notamment supprimé les 35 heures hebdomadaires, relevé des seuils sociaux ou encore restreint le champ du compte pénibilité. À l’issue de cette journée marathon d’examen, la commission a voté l’ensemble du projet du loi, après avoir modifié son titre à l’initiative du rapporteur : projet de loi « relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels ».

Concluant sur une nouvelle note footballistique, Isabelle Lemorton a brandi une écharpe bleue, espérant que le match dimanche avec l’équipe de France mette tout le monde « d’accord ».