Auteur : admin4628

Loi travail : Cazeneuve déplore « l’abaissement de la politique »

Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a fustigé vendredi le « narcissisme » et les « égotismes » à l’oeuvre dans la classe politique, alors que le gouvernement est en butte à de vives critiques, notamment socialistes, pour son utilisation du 49-3 sur la loi travail.

Interrogé sur France 2 sur un éventuel manque d’autorité au sommet de l’Etat, le ministre, qui s’est dit « plus que jamais » fidèle à François Hollande, a pointé « un problème » sur lequel « chaque responsable politique devrait s’interroger », celui des « égotismes face à ce que l’on appelle, quand on est responsable, le sens de l’Etat ». « Les égotismes, ce sont tous ceux qui considèrent que pour 3 minutes d’antenne à BFM, on peut oublier ce qu’est l’intérêt de la nation », a lancé Bernard Cazeneuve. Et d’ajouter : « ils sont plus nombreux qu’on ne le croit. »

« L’abaissement de la politique »

Le recours mardi au 49-3 (adoption d’un texte sans vote avec engagement de la responsabilité du gouvernement) pour forcer l’adoption de la loi travail, contestée aussi dans la rue, a conduit – une première sous ce quinquennat – 56 députés de gauche, dont 28 socialistes ou apparentés, à signer un projet de motion de censure qui a échoué d’un cheveu. La droite, de son côté, a échoué sans surprise à faire adopter sa propre motion de censure.

Chaque responsable politique doit se poser « une seule et unique question », a expliqué Bernard Cazeneuve: « comment fait-on dans un contexte difficile pour conforter les institutions et pour être dans l’éthique de la responsabilité davantage que dans le narcissisme ? » « Le problème n’est pas seulement celui de l’autorité » mais celui de « l’abaissement de la politique », a dénoncé le ministre, appelant à faire « prévaloir le sens de l’Etat sur toute considération de petite politique ».

Harcèlement sexuel : Denis Baupin rattrapé par ses propres tweets

L’enquête est accablante : au micro de France Inter et sous la plume de Mediapart, quatre femmes témoignent ce lundi matin à visage découvert et dénoncent des faits relevant d’agressions sexuelles et de harcèlement sexuel de la part du député écologiste de Paris Denis Baupin. D’autres femmes, collaboratrices ou salariées, ont également appuyé ces accusations via des témoignages anonymes.

« Il m’a plaquée contre le mur en me tenant par la poitrine et a tenté de m’embrasser dans le couloir, durant une pause alors que j’animais une réunion », révèle notamment Sandrine Rousseau, porte-parole d’EELV et ancienne tête de liste aux élections régionales. « J’en ai parlé à deux membres de la direction du parti. L’un m’a dit : Ah, il a recommencé ! L’autre : Ce sont des choses qui arrivent très souvent », confie-t-elle encore aux auteurs de l’enquête.

Comme souvent dans ces cas-là, les réactions des internautes sont nombreuses et l’indignation est générale. Là où l’affaire prend une tournure toute particulière sur Twitter, c’est lorsque d’anciens tweets, gênants dans ce cas précis pour le député, viennent étayer les sarcasmes et amplifier la vindicte populaire.

Reconnu pour être un utilisateur de Twitter très actif, tweetant même parfois en présidant les séances au perchoir de l’Assemblée nationale, Denis Baupin compte aujourd’hui près de 70 000 messages sur son compte. Une activité parfois démesurée qui compte évidemment bon nombre de tweets en rapport avec l’activité parlementaire, par exemple sur l’adoption par l’Assemblée d’une loi sur le harcèlement sexuel…

Vote à l’unanimité de la loi contre le harcèlement sexuel. Fierté de participer à ce vote de justice. Fin de la session extraordinaire

— Denis_Baupin (@Denis_Baupin) 31 juillet 2012

En mars dernier, l’écologiste participait aussi à l’opération #mettezdurouge sur le Web, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes. Une opération de communication politique que les internautes ont évidemment immédiatement raillée aujourd’hui en prenant quelques captures d’écran pour immortaliser ces clichés pris pour l’occasion.

« Quand j’ai vu la photo de #Baupin pour la journée du #8mars je suis allé vomir » @debostelenhttps://t.co/lmtE3MFWUmpic.twitter.com/yCdiPH23Nx

— Paul Denton (@paul_denton) 9 mai 2016

Entre les commentaires indignés et l’émoi suscité par de telles accusations, les utilisateurs de Twitter se permettent également de jouer quelques traits d’humour en établissant des parallèles avec d’autres politiques, un en particulier, non des moins connus pour ses affaires de moeurs…

« On accueille un nouvel arrivant.

Bonjour Denis.

Sois le bienvenu.

-Un conseil?

-Une question? »#TraduisonsLespic.twitter.com/1oudstNlYw

— Guillaume Blardone (@gblardone) 9 mai 2016

Frédéric Thiriez : « Gaston Defferre était un homme d’État »

Avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation et président de la Ligue de football professionnel de 2002 à avril dernier, Frédéric Thiriez est appelé à 29 ans auprès de Gaston Defferre. D’abord conseiller technique, il sera pendant près de deux ans son directeur de cabinet. « J’ai adoré travailler avec lui. Il m’a tout appris », résume-t-il avec enthousiasme. Pour les 30 ans de la mort, le 7 mai 1986, il revient sur celui qui fut un emblématique maire de Marseille, ministre de l’Intérieur et personnalité politique éminente des IV et Ve Républiques.

Le Point.fr : Quand avez-vous travaillé avec Gaston Defferre ?

Frédéric Thiriez : J’ai travaillé à ses côtés de l’élection de François Mitterrand en 1981 à la défaite de la gauche aux législatives de 1986. D’abord au ministère de l’Intérieur, comme conseiller technique chargé de la police, puis comme directeur de cabinet du secrétaire d’État à la Sécurité publique Joseph Franceschi, où j’étais surtout chargé de la coordination de la lutte antiterroriste ; puis comme directeur de cabinet de Defferre lorsqu’il est devenu en 1984 ministre d’État chargé du Plan et de l’Aménagement du territoire.

Trente ans après sa mort, quel héritage politique a-t-il laissé ?

Gaston Defferre n’était pas l’homme d’une ville, comme on le croit souvent. C’était un homme d’État, au sens complet du terme, stratège, et pas seulement tacticien, visionnaire et courageux. La France lui doit, par exemple, la décolonisation de l’Afrique, la décentralisation, l’arrivée de François Mitterrand à la tête du PS, et donc la victoire de la gauche, mais aussi le Plan informatique pour tous de 1984, véritable révolution à l’époque, même si la réalisation n’a pas été à la hauteur des ambitions initiales.

Gaston Defferre a-t-il laissé ses héritiers politiques ?

Il existe une sorte de malédiction chez les grands hommes, leur difficulté à prévoir et à organiser leur propre succession. Sans doute parce qu’ils se pensent immortels… C’était son cas, et c’était aussi sa force.

Pourquoi souffre-t-il aujourd’hui d’une image si médiocre ?

La réalité de « l’homme Defferre » (c’est le titre d’un livre que je voulais lui consacrer, mais que je n’ai pas encore eu le temps d’écrire !) n’a rien à voir avec son image publique, celle que les « gens du Nord » ont de Marseille. Ayant vécu au quotidien avec lui pendant cinq ans, je peux en témoigner. Protestant cévenol, il était d’une rigueur et d’une intransigeance avec lui-même qui étonnait. Austère même : hygiène de vie sévère, travailleur infatigable, intégrité morale (il refusait par exemple tout cadeau de qui que ce soit et les faisait renvoyer par la poste !), mais aussi un profond respect, et même une affection sincère, pour ses collaborateurs. Il était très touchant dans ses relations avec Edmonde, dont il était très amoureux. Il lui téléphonait dix fois par jour !

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Edmonde Charles-Roux et Gaston Defferre.  © La Provence/Maxppp

À quel moment Defferre vous a-t-il bluffé ?

Son sang-froid et son courage lors des attaques terroristes de 1982-1983 (perpétrées par Action directe, NDLR), alors qu’il était personnellement menacé tous les jours, m’ont impressionné. Moi-même, j’étais armé en permanence et m’entraînais au tir tous les lundis matins ! Il m’expliquait n’avoir aucun mérite à être courageux, car c’était dans sa nature… Il l’avait d’ailleurs prouvé en maintes occasions, notamment dans la résistance. Ce sang-froid n’était pas partagé par tous au plus haut niveau de l’État. Il m’a bluffé aussi, dans un autre registre, lorsqu’il m’a emmené en Californie avec Jean-Jacques Servan-Schreiber rencontrer Steve Jobs qui voulait lui montrer les performances du tout nouveau Macintosh. Gaston Defferre voulait en équiper toutes les écoles de France !

Quelles relations entretenait-il avec François Mitterrand ?

Je crois, du moins c’était ce que l’on se disait à l’époque, que seuls deux hommes pouvaient se permettre de tout dire franchement à Mitterrand : Pierre Joxe et Gaston Defferre.

A-t-il eu la carrière politique qu’il méritait ?

I had a dream ! J’aurais bien imaginé un « ticket » composé de Gaston Defferre, Premier ministre, et de Michel Rocard, qui aurait été un grand président de la République. Mais c’était un rêve…

À la une ce mardi 3 mai…

Loi Travail – Début de l’examen du texte sur la loi travail à l’Assemblée nationale sur fonds de tensions sociales. En fin de matinée, la CFE-CGC appelle à un rassemblement près de l’Assemblée nationale pour « faire évoluer » le projet de loi El Khomri.

Justice – Procès du président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Roger Cukierman, poursuivi par le polémiste Dieudonné pour l’avoir notamment qualifié d’antisémite

Football – Equipe redoutable, l’Atletico Madrid ferait presque figure de favori de la Ligue des champions à l’heure de briguer une qualification pour la finale mardi (18H45) face au Bayern Munich, étouffé en demi-finale aller (1-0). L’autre demi-finale retour, Real Madrid – Manchester City est programmée mercredi.

Mode – Défilé Chanel à Cuba.

The invitation for the Cruise 2016/17 show on Tuesday, May 3rd, 2016 in Havana, Cuba. #ChanelCruiseCuba#CocoCubapic.twitter.com/1NW5IQPFdl

— CHANEL (@CHANEL) 1 mai 2016

Pour Sapin, les conditions seront bientôt propices à une candidature de Hollande

Michel Sapin a déclaré mercredi qu’« en un an beaucoup de choses peuvent se redresser » dans une France toujours « dans une période de scepticisme », considérant possible de « créer les conditions propices à une candidature du président de la République » pour 2017. « Comment est-ce qu’on sort de ce scepticisme de neuf années consécutives ? » où, de 2007 à 2016, il y a eu une « stagnation de la richesse par habitant, ce que la France n’a jamais connu depuis 1945 », a demandé le ministre des Finances devant l’Association des journalistes parlementaires (AJP).

Outre « les déficits qui baissent », avec un effet sur « l’endettement », Michel Sapin a déclaré que « le chômage est un élément absolument décisif, mais ne suffit pas à ce retour de l’espoir, du moral ». Des contrats, comme celui des sous-marins de la DCNS, peuvent permettre aux Français de « reprendre confiance, comprendre que nous sommes une très grande nation », et « nous avons besoin de résultats visibles, tangibles, en termes d’activité économique (…), la baisse du chômage depuis le début de l’année doit se continuer », selon l’ancien ministre de l’Emploi.

« Dans le paysage politique d’aujourd’hui », il a épinglé, sans la nommer, la présidente du FN, Marine Le Pen, « qui répond par l’absence de réponses » à « l’absence d’espoir ». « Le vote de désespoir, c’est celui contre lequel nous devons évidemment lutter », a-t-il ajouté. « Malgré tout, dans le monde d’aujourd’hui (…), en un an, beaucoup de choses peuvent se redresser, (des choses) peu(vent) changer dans la perception que les Français ont de l’action que nous avons menée, la personnalité du président de la République », aux yeux de Michel Sapin. Et, a glissé ce proche de François Hollande, « à partir de là, nous avons les moyens de créer les conditions propices à une candidature du président de la République ».

Quand Jean-Louis Debré tente d’intimider un policier

Il n’est plus ministre de l’Intérieur depuis 1997, mais tente encore de bénéficier des privilèges du poste. Le 9 avril dernier à Paris, le véhicule conduit par Jean-Louis Debré s’est retrouvé bloqué par un barrage policier à cause d’une manifestation contre la loi travail place de la République. L’ancien président du Conseil constitutionnel a alors franchi une ligne continue en faisant demi-tour, puis a intimidé un policier.

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Au volant d’une Peugeot 508 banalisée police, raconte Le Parisien, Jean-Louis Debré tente de faire un demi-tour en voyant le cordon de policiers empêchant le passage aux voitures. Après sa manoeuvre hasardeuse où il franchit une ligne continue, un des policiers le stoppe à un feu rouge et lui explique qu’il ne peut passer pour raisons de manifestation. L’ancien pensionnaire de Beauvau baisse alors sa vitre et lance au brigadier : « Je suis de la maison. Vous devez me faire passer. »

« Contre les privilèges »

Manque de chance, Jean-Louis Debré s’est retrouvé face à un policier tatillon qui lui demande de présenter sa carte de police. « Je ne suis pas vraiment de la police », mais « un ancien ministre de l’Intérieur », précise Debré. Mais pourquoi roule-t-il à bord d’une voiture banalisée ? « Un véhicule du SPHP (Service de protection des hautes personnalités, NDLR), le service est au courant », ajoute-t-il.

Le brigadier lui demande alors les papiers du véhicule. Mauvaise journée décidément pour Jean-Louis Debré qui n’a ni carte grise ni attestation d’assurance. Juste une carte d’identité et son permis de conduire. L’homme politique décide alors de téléphoner à un commissaire de police – qu’il connaît – et tend le téléphone au policier qui l’a interpellé. Refus de ce dernier à qui Debré demande son RIO (matricule) et son service d’affectation. « J’ai effectivement téléphoné à un inspecteur qui me suit », avoue l’ancien ministre qui ajoute : « Le policier m’avait dit : Je suis contre les privilèges ! »

L’affaire est en tout cas remontée jusqu’aux oreilles du ministère de l’Intérieur où la tentative de Jean-Louis Debré n’a pas plu du tout. Elle a même exaspéré un haut fonctionnaire cité par Le Parisien : « Il est quand même gonflé ! Debré fait la morale à tout le monde dans son bouquin (Ce que je ne pouvais pas dire, NDLR), écrit que Au sommet de l’État, certains se croient tout permis et traite Rachida Dati de petite fille gâtée ! »

« La gauche aujourd’hui ne me satisfait pas », affirme Emmanuel Macron

Le ministre de l’Économie Emmanuel Macron a expliqué avoir lancé son propre mouvement politique « En Marche », car « la gauche aujourd’hui » ne le « satisfa(isait) pas », lors d’une interview qui sera diffusée dimanche sur Arte. « Moi je ne mens pas aux gens, je dis ce que je pense, je le dis depuis le début. Je suis de gauche, c’est mon histoire. Mais la gauche aujourd’hui ne me satisfait pas », a déclaré Emmanuel Macron lors de cet entretien réalisé deux jours avant le lancement de son mouvement le 13 avril et dont des extraits sont publiés sur internet. « A mes yeux, le vrai clivage dans notre pays (…) est entre progressistes et conservateurs, c’est ce clivage que je veux rebâtir maintenant et je ne veux pas attendre 2017 » pour cela, a-t-il ajouté.

« Je veux pouvoir construire une action commune avec toutes les bonnes volontés qui croient à ce progressisme pour le pays », a conclu le ministre. Cette sortie intervient au terme d’une intense semaine médiatique pour le ministre de l’Économie, qu’un sondage Vivavoice pour Libération a érigé en candidat de gauche préféré des Français et qui a semblé voler la vedette à François Hollande lors d’une visite d’entreprise jeudi à Chartres.

Pas « l’obligé » du président

Alors que le chef de l’État l’avait publiquement recadré la semaine précédente (« Il sait ce qu’il me doit », avait-il déclaré sur France 2), Emmanuel Macron a également, dans un entretien publié vendredi par les quotidiens du groupe Ebra, estimé qu’un ministre n’était pas « l’obligé » du président de la République, s’attirant en retour des réactions courroucées à gauche et jusque dans les rangs du gouvernement. Vendredi, en déplacement à Varsovie, le ministre de l’Économie avait cependant protesté de sa loyauté à l’égard de François Hollande, demandant à ce « qu’on ne (l)’utilise pas » pour « attaquer » le chef de l’État. Emmanuel Macron, ancien secrétaire général adjoint de l’Élysée, a été nommé à Bercy en juin 2014 en remplacement d’Arnaud Montebourg. Il a lancé le 6 avril à Amiens, sa ville natale, le mouvement « En Marche » qui, a-t-il alors expliqué, ne sera « pas à droite, pas à gauche ».

Nuit debout : Ruffin, l’empêcheur de rêver en rond

Ils étaient de retour sur la scène initiale du crime : la bande du journal satirico-social Fakir organisait mercredi 20 avril à la Bourse du travail de Paris, à deux pas de la place de la République, un meeting sur le thème : « Nuit debout, et après ? » Retour en arrière : il y a 3 semaines, à la suite du bon accueil réservé à son docu pamphlétaire et culotté, Merci patron !, Francois Ruffin, le directeur amiénois de Fakir, organisait dans ces mêmes murs une soirée à l’intitulé couperet, « Leur faire peur », consacrée à la meilleure façon de résister à « l’oligarchie » et faire converger les luttes éparses. Une fois retombée l’atmosphère de meeting exalté dans ce lieu de la gauche canal historique, les potes de Fakir, Francois, Joanna, Sylvain…, s’étaient retrouvés pour prendre un pot dans un café à deux pas. Comment faire pour ne pas laisser retomber la pression, s’interrogent les agitateurs ? C’est à cet instant que quelqu’un émit l’idée d’une occupation de place à l’issue de la manifestation contre la loi travail, prévue le 31 mars.

Le DAL (Droit au logement) fut contacté pour réserver l’esplanade de la République auprès de la préfecture. On chercha à baptiser cet « after » manifestant un peu inédit : Nuit rouge ? Trop dur, trop connoté. Ce sera Nuit debout… La suite est désormais connue. Ce mercredi 20 avril, ils sont de nouveau tous là, plus remontés que jamais. À deux pas, la Nuit debout n’a entre-temps pas découché, petite Babel avec ses milliers de visiteurs et participants, ses stands où s’écoulent les essais radicaux dernier cri, sa radio, sa télé, sa commission féministe « non mixte », les militantes en hidjab du BDS (qui milite pour le boycott d’Israël) qui vendent des falafels, son assemblée générale permanente où l’on évoque l’Équateur, la vie en entreprise et le sort des réfugiés. « C’est bizarre, il y a des milliers de personnes, ça parle, mais il ne se passe rien », confie un militant de la Fédération anarchiste qui écoule le stock d’invendus de sa librairie rue Amelot. Comme lui, mezzo voce, tout le monde en convient : ça stagne. L’équivalent gauchiste de la Foire du Trône ? « Nous tournons en rond dans la nuit », prophétisait déjà en latin Guy Debord.

Le grand air de la crainte de la récup »

Pour trouver le second souffle, la bande de Fakir est de retour. Mais la Bourse du travail est désormais trop étroite pour accueillir tous ceux qui entendent concocter avec eux la suite des événements : à l’extérieur, on manque de s’écharper avec la sécurité du vénérable lieu syndical, traitée de « fasciste » quand elle boucle les portes alors que l’intérieur est déjà plein comme un œuf. À l’intérieur, sous le regard imperturbable du buste du commandeur Jaurès, Francois Ruffin, de son ton égal, placide et matois, plaide auprès des jeunes et moins jeunes faunes libertaires de la nécessité de « faire jonction » avec les organisations syndicales le 1er mai. Frédéric Lordon, l’intellectuel en chef – quoiqu’il s’en défende – du grand raout radical, prend les accents d’un orateur de la Convention pour fustiger « les chefferies éditocratiques [entendez les médias de l’oligarchie] qui veulent nous cantonner à l’animation citoyenne » et dénoncer le risque de « l’unanimisme démocratique ». Bref, il faut redonner la priorité au mot d’ordre, à la lutte et au social, quitte à forcer la main à ceux qui s’écoutent parler H24.

En face, comme attendu, ça renâcle : les noctambules debout n’ont rien contre le 1er mai, mais jouent le grand air de la crainte de la récup’, et surtout éprouvent le besoin impérieux de s’exprimer dès maintenant chacun leur tour. Le micro passe de main en main, l’atmosphère d’assemblée reprend ses droits, chacun y va de sa considération sur la banque, la démocratie, la marche du monde… « C’est dur », confie un Ruffin souriant mais crevé, contraint d’amadouer l’hydre qu’il a contribué à faire accoucher. À l’extérieur, de vieux routiers de la contestation pestent contre le manque de culture militante des petits-bourgeois apôtres de la démocratie directe. Passe le fantôme de mai 1968, CGT contre gauchistes, léninistes contre « désirants » deleuziens, mais cette fois en live sur l’application Periscope.

Meeting commun avec les syndicats le 1er mai

Le meeting s’achève dans une certaine confusion, la Fanfare invisible, brass band au répertoire contestataire, fait retentir joyeusement ses cuivres comme dans une fête chtimi. Qu’importe : François et les siens ont réussi plus ou moins à emporter l’adhésion sur l’invitation faite aux organisations syndicales à se joindre à Nuit debout. Et la petite troupe de filer déjà à grandes enjambées, dans le mode commando qu’elle affectionne, faire part de sa motion à la multitude étalée à deux pas de là, qui communie lascivement sous les étoiles aux accords de la symphonie du Nouveau Monde de Dvorak, exécuté par l’orchestre classique amateur qui a posé là ses archets.

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Arrivé à la tribune des orateurs, on réussit à bousculer l’ordonnancement prévu des orateurs pour intercaler une prise de parole. Chaque terme est soigneusement pesé, pour ne pas effaroucher la masse assemblée qui ne redoute rien tant qu’émerge de ses rangs un leader ou une organisation : on informe donc modestement que, à la suite de « débats houleux » au cours de la réunion voisine, il a été suggéré que les syndicats se retrouvent pour un grand meeting commun à la conclusion de leur défilé du 1er mai, « un événement historique ». L’idée n’est pas encore mise au vote, afin de ne pas se lancer dans l’interminable processus de comptage et débats, mais simplement testée sur les esprits. Plusieurs mains s’agitent en signe d’approbation, selon la gestuelle prévue à cet effet. Les compères jaugent l’accueil de façon positive. Eux ne doutent pas que, sous les proclamations de l’horizontalité absolue, ce sont « les minorités agissantes qui font l’histoire », comme le disait le bras droit de Bernard Arnault, cet ancien flic, dindon de la farce et héros involontaire de Merci Patron !, le film filou par lequel tout a commencé.

Que pense justement de tout cela le démiurge de la Nuit debout ? « Je n’ai pas encore pété les plombs, sourit François Ruffin, qui pianote sur son téléphone pour répondre à la marée de SMS et de sollicitations qui l’assaillent depuis quelques semaines. Je ne pense pas trop pour le moment, j’avance. » S’il se doutait que le documentaire était suffisamment bien calibré pour trouver son public – « dépasser la barre des 100 000 spectateurs » -, rien ne laissait prévoir que s’ensuivrait un vaste mouvement de contestation protéiforme, « ça, c’est quelque chose qui nous a échappé ».

Depuis les États-Unis, l’agitateur et réalisateur Michael Moore en personne a salué dans un tweet le geste de son double frenchie.

Woke up to this today in the Times: French filmmaker « inspired by Michael Moore » makes a movie that sparks a revolt: https://t.co/ZUmPw1g5HA

— Michael Moore (@MMFlint) 16 avril 2016

Un signe qui compte pour Ruffin, qui ne cachait pas son admiration pour l’Américain du temps où il s’ennuyait sur les bancs du Centre de formation des journalistes. Lui ne rêvait que d’un média furibard et engagé, avec ce qu’il faut de roublardise. Aujourd’hui, le songe est devenu réalité : la nuit peut continuer à rêver debout, le camarade Ruffin court déjà concocter pour elle le lendemain qui chante.

Loi travail : Valls refuse d’être « l’otage » de Gattaz

Manuel Valls a regretté mercredi la « méthode » du président du Medef Pierre Gattaz dont « l’ultimatum » sur la loi travail prend « en otage la négociation de l’assurance chômage ». « Je regrette cette méthode qui consiste à poser des ultimatums. Prendre en otage la négociation de l’assurance chômage, c’est-à-dire sur le revenu de ceux qui ont perdu un emploi, c’est, je crois, ne pas être à la hauteur des responsabilités en tant que partenaire social », a indiqué le chef du gouvernement sur France Info. Le patron du Medef a menacé mardi de se retirer de la négociation d’assurance chômage si « rien ne bouge rapidement » sur le projet de loi travail. « Ni ces négociations ni la loi sur le travail (…) ne deviendront l’otage d’enjeux internes au patronat », a répondu mercredi le Premier ministre.

« Je veux rappeler que la nation, c’est-à-dire les Français, a consenti un effort de plus de 40 milliards d’euros qui était nécessaire pour faire baisser le coût du travail, la fiscalité sur les entreprises qui avait trop augmenté entre 2008 et 2012, entre 2012 et 2014. Cet effort a été fait, avec des résultats. Je crois à la négociation, au dialogue, au rôle des partenaires sociaux, au paritarisme. Quand on discute, quand on négocie, on ne pose pas des ultimatums », a souligné Manuel Valls, qui appelle Pierre Gattaz à « respecter le Parlement qui s’est saisi de cette loi, l’enrichit, l’amende, est à l’écoute par ailleurs des partenaires sociaux ».

La loi travail, « un texte équilibré et dynamique »

Ce projet de loi sur le travail, qui a connu plusieurs versions et a suscité de nombreuses oppositions, dont le mouvement Nuit debout, est « un texte équilibré, dynamique en faveur des entreprises, en faveur des entrepreneurs comme en faveur des salariés puisqu’il leur apporte de nouveaux droits et de nouvelles protections », a assuré le chef du gouvernement.

La réforme du Code du travail, bien qu’édulcorée pour apaiser la colère de la majorité, répond à plusieurs revendications patronales : clarification des critères de licenciement économique, assouplissement du temps de travail, accords dits « offensifs » en faveur de l’emploi… Par ailleurs, organisations patronales et syndicales négocient depuis février une nouvelle convention d’assurance chômage, qui doit entrer en vigueur le 1er juillet. La prochaine séance, le 28 avril, n’est pas remise en cause, selon une source au Medef.

Présidentielle 2017 : Hollande en quatrième position au premier tour ?

Encore une enquête d’opinion difficile à avaler pour François Hollande. Selon le premier sondage réalisé sur les intentions de vote depuis son intervention télévisée dans l’émission spéciale Dialogues citoyens jeudi 14 avril, sur France 2, l’actuel chef de l’État n’a toujours pas réussi à reconquérir le cœur des Français. Alors qu’il avait déjà peu réuni autour de lui – seuls 3,5 millions de Français l’ont écouté, François Hollande n’a pas convaincu les électeurs. Selon le sondage TNS Sofres-OnePoint, réalisé pour RTL, LCI et Le Figaro, le président sortant perdrait dès le premier tour de l’élection présidentielle, devancé largement par Marine Le Pen et par le candidat Les Républicains. Pis, le voilà talonné par Jean-Luc Mélenchon, qui semble, quant à lui, porté par la mobilisation contre la loi travail. Ce dernier rassemble 12 % d’intentions de vote contre 13 % pour le président sortant si Alain Juppé est candidat à droite ; si c’est Sarkozy, 14 % contre 16 % à François Hollande. Et si c’était Bruno Le Maire, le député européen du Parti de gauche passerait même devant le président sortant, le reléguant à la quatrième place !

Seul Juppé devancerait Le Pen au premier tour

Toujours selon ce sondage, le PS devrait miser sur Emmanuel Macron : l’actuel ministre de l’Économie, qui vient de créer le mouvement En marche !, aurait les faveurs des militants socialistes (27 %), suivi de très près de Manuel Valls (25 %), alors que Martine Aubry n’est préférée que par 18 % d’entre eux. En revanche, c’est elle qui serait la favorite des sympathisants de gauche (25 %). Sur l’ensemble des Français, 28 % préféreraient une candidature de Macron, moitié moins (14 %) pour Manuel Valls et Martine Aubry (12 %).

À droite, Alain Juppé est toujours clairement en tête des intentions de vote avec 35 % (il gagne 4 points par rapport à décembre) des voix au premier tour. Marine Le Pen perd, quant à elle, deux points, à 26 %. Alain Juppé est le seul candidat de droite susceptible de devancer la présidente du Front national dès le premier tour : en effet, Marine Le Pen arriverait en tête à l’issue du premier tour si elle était opposée à Nicolas Sarkozy (24 % contre 29 %), François Fillon (23 % contre 32 %) ou Bruno Le Maire (21 % contre 30 %).