« Mais quel cirque ! Quel cirque ! » Ce cacique socialiste d’Ille-et-Vilaine n’en croit toujours pas ses yeux. Quelques jours après un article du Point évoquant les craintes de troubles à l’ordre public en marge du meeting de Manuel Valls prévu à Rennes lundi 16 janvier, voilà que l’intéressé annule son déplacement. Motif officiellement invoqué : le ministre de la Défense et président de la région Jean-Yves Le Drian – soutien de poids du candidat – ne peut être présent, pris « par des obligations ministérielles ». Officieusement, le camp Valls cherchait une porte de sortie, avec l’aide du Breton.
Le meeting de #Valls à #Rennes est annulé. Motif : J.Y #LeDrian ne pourra être présent… (comité de soutien) #PrimaireGauchepic.twitter.com/PUzyBtG3eb
— Olivier Pérou (@OlivierPerou) 10 janvier 2017
Une « farine party »
Pour Manuel Valls, les mauvaises nouvelles s’enchaînent. La séquence a commencé à Liévin dans le Pas-de-Calais le 8 janvier, où il a tenu un meeting dans une salle à moitié vide. Deux jours plus tard, 300 personnes seulement viennent écouter le prétendant à l’investiture socialiste à Clermont-Ferrand, là où Emmanuel Macron rassemblait 2 500 personnes soixante-douze heures plus tôt. La réunion publique qui devait se tenir à Rennes, elle, n’augurait rien de bon. Bastion de la gauche depuis quarante ans, la ville est d’autant plus symbolique qu’elle est un piège pour Manuel Valls particulièrement. Haut lieu des contestations contre la loi travail il y a huit mois, syndicalistes locaux et étudiants lui préparaient un accueil mouvementé. Force ouvrière (FO) lançait un appel à manifester et des milliers de personnes promettaient sur Facebook de venir organiser une « farine party », en référence à l’enfarinage de Manuel Valls à Strasbourg le 22 décembre. « Il ne pouvait se permettre de tenir un meeting avec si peu de monde dans la salle et, à l’extérieur, 1 000 personnes qui hurlent contre lui. S’il n’annulait pas, il aurait fallu encadrer le centre-ville rennais avec des dizaines et des dizaines de CRS. Triste image pour un candidat de la gauche dans une ville de gauche », observe un socialiste rennais partisan de Manuel Valls.
Porte de sortie
Selon nos informations, les mobilisations anti-Valls à Rennes inquiétaient l’équipe du candidat, qui cherchait « une porte de sortie ». Et c’est Jean-Yves Le Drian qui va lui trouver. Pris par des « obligations ministérielles », le locataire de l’hôtel de Brienne ne pourra faire le déplacement à Rennes. « Il aurait été en retard au meeting, ce qui aurait été mal interprété », glisse l’entourage du ministre qui en a informé Manuel Valls au téléphone il y a quelques jours. Le ministre de la Défense participera en effet ce jour-là à Paris à une rencontre entre les chefs d’état-major de la coalition internationale contre Daech. Un rendez-vous de dernière minute qui arrange également les affaires de Jean-Yves Le Drian, lui qui hésitait à prendre la parole au meeting. Ses proches le poussaient à « lever le pied » sur son soutien au candidat « vu la tournure que prend sa campagne pour la primaire ». « Nous n’avons pas très envie de prendre des risques », fait savoir au Point un proche de Le Drian. D’autant qu’il se prépare à reprendre à plein temps les commandes de la région dans quelques mois.
L’ultime explication se trouverait du côté de l’Élysée. Selon le journaliste du Télégramme Hubert Coudurier, François Hollande ne digère toujours pas la défection de son fidèle compagnon Jean-Yves Le Drian. En décembre, le pensionnaire de la Défense évoquait sur Europe 1 une candidature – alors hypothétique – de Manuel Valls pour 2017. Le ministre et François Hollande auraient alors eu une explication houleuse. Depuis, Manuel Valls et François Hollande – qui ne se parlent plu– tenteraient de s’arracher Jean-Yves Le Drian. Et si l’annulation du meeting par Manuel Valls avait pour objectif de ne pas trop froisser Jean-Yves Le Drian ?