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Nice : le rapport de l’IGPN « flou » sur le dispositif de sécurité

Le rapport de la « police des polices » sur le dispositif de sécurité à Nice le soir de l’attaque de la Promenade des Anglais « reste flou » sur son évolution dans la soirée et ne répond pas à toutes les questions, estime ce jeudi Les Républicains. Le rapport de l’IGPN (Inspection générale de la police nationale) « reste flou sur l’évolution du dispositif heure par heure » et « ne répond pas à la question: quel était l’état exact du dispositif au moment de l’attaque meurtrière ? », asure un communiqué de LR.

Un rapport demandé par l’Intérieur

Compte-tenu du risque d’attentat élevé et de l’état d’urgence, « pourquoi n’a-t-il pas été fait droit à la demande du préfet de mise à disposition d’une unité de force mobile comme cela avait été le cas l’année précédente, ainsi que le mentionne le rapport ? », écrit par ailleurs le secrétaire général adjoint de LR Sébastien Huyghe, en demandant : « l’absence de telles unités opérationnelles a-t-elle un lien avec leur surmobilisation pour sécuriser les fan-zones de l’Euro ? ».

LR note également que « ce type d’enquête, quelle que soit la grande qualité des inspecteurs chargés de la mener, ne peut pas être qualifiée d’+indépendante+ car l’IGPN dépend directement du directeur général de la Police nationale, lui-même placé directement sous l’autorité du ministre de l’Intérieur ». Face aux polémiques, Bernard Cazeneuve avait demandé le 21 juillet un rapport à l’IGPN sur ce dispositif de sécurité, qui n’avait pu empêcher Mohamed Lahouaiej Bouhlel de foncer avec un camion dans la foule, tuant 84 personnes.

À la une ce jeudi 28 juillet…

Sécurité – Le président s’entretient avec les parlementaires ayant travaillé sur les possibilités de constitution d’une Garde nationale en France.

En parallèle, l’enquête se poursuit après l’assassinat d’un prêtre dans une église par deux djihadistes dont l’un n’a pas encore été identifié, un nouvel attentat qui pèse sur la cohésion du pays. La marche blanche en hommage au prêtre décédé prévue ce jeudi a été annulée à Saint-Etie

nne-du-Rouvray pour des raisons de sécurité.

Brexit – Déclaration commune de Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères et du développement international, et de son homologue britannique, Boris Johnson, au Quai d’Orsay.

Social – Les syndicats SNPNC-FO et Unsa-PNC appellent les hôtesses et stewards d’Air France à la grève du 27 juillet au 2 août inclus pour « peser sur les négociations en cours concernant leurs rémunérations et règles de travail ». Pour le deuxième jour de ce mouvement de protestation, la compagnie prévoit d’assurer près de 80 % de ses vols en moyenne, un peu moins qu’au premier jour,

Justice – Salah Abdeslam, seul survivant du commando des attentats du 13 novembre, demande au Conseil d’Etat la suspension de sa mise sous vidéosurveillance en invoquant une atteinte illégale à sa vie privée. En première instance il avait été débouté de sa demande par le tribunal administratif de Versailles. L’Assemblée nationale a depuis voté le 20 juillet une base légale à la vidéosurveillance de détenus comme Abdeslam qui était juridiquement contestée par ses avocats.

Zapping du « Point » – « Je suis Uber » : la campagne qui tombe très mal

À 9 h 45 ce matin, deux terroristes d’une vingtaine d’années, en possession d’armes blanches et d’une ceinture d’explosifs factice, sont entrés dans l’église de Saint-Étienne-du-Rouvray et ont retenu en otage cinq personnes. Avant d’être abattus par la police, les assaillants ont égorgé Jacques Hamel, un prêtre âgé de 84 ans, alors qu’un autre otage est encore entre la vie et la mort. L’attaque a été revendiquée par l’Amaq, l’agence de presse officielle du groupe État Islamique. Dépêché sur place, François Hollande a déclaré devant la presse : « Nous sommes face à un groupe, Daech, qui nous a déclaré la guerre. Nous devons mener cette guerre, par tous les moyens, dans le respect du droit, ce qui fait que nous sommes une démocratie », en demandant parallèlement « la cohésion de tout le pays ». À moins de 24 heures de l’ouverture des Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) à Cracovie, Monseigneur Georges Pontier a demandé aux catholiques de ne céder ni à la violence, ni à la haine, ni à la vengeance.

Dans le reste de l’actualité, nouveau coup dur pour l’entreprise de transport Uber, qui est désormais interdite en Hongrie. Pour dénoncer cette mesure gouvernementale, le géant américain a répliqué en créant un spot publicitaire qui a pour slogan : « Je suis Uber. » Une stratégie marketing critiquable au vu du contexte actuel.

Enfin, l’avion solaire Solar Impulse 2 a bouclé le premier tour du monde – soit près de 40 000 kilomètres – sans la moindre goutte de carburant. Une prouesse technologique, mais qui met aussi en lumière les limites de cette énergie renouvelable.

Le gouvernement en séminaire pour préparer la rentrée

Un séminaire gouvernemental s’est ouvert samedi à l’Élysée vers 10 heures sous la présidence de François Hollande pour définir les « priorités de la rentrée », a indiqué l’Élysée à l’AFP. « L’ordre du jour, c’est de définir les priorités de la rentrée. En matière de sécurité, de défense, de justice, avec le contexte d’aujourd’hui », celui de l’attentat du 14 juillet à Nice, qui a fait 84 morts, a indiqué l’entourage de François Hollande. Trois autres domaines seront étudiés : « l’Europe, dans le contexte du Brexit ; la consolidation économique ; et l’engagement, la participation, autour de la réserve citoyenne », a-t-on indiqué de même source.

« Il n’y a pas d’ordre du jour formel, c’est un moment d’échange, de réflexion, pour définir les priorités de la rentrée », mais ce n’est pas « décisionnel », a-t-on indiqué de même source, rappelant qu’il y a encore « deux conseils des ministres » à l’agenda avant la pause estivale.

Lors du compte-rendu du Conseil des ministres, mercredi, le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll avait indiqué que « l’ordre du jour de ce séminaire, c’est ce qui s’est passé la semaine dernière, l’état d’urgence, mais aussi la préparation de l’ensemble du travail parlementaire et gouvernemental sur la fin de l’année, avec une loi de finances, et la préparation de la position française sur la question européenne » après le Brexit. Le dernier séminaire de ce type s’était tenu le 19 décembre 2015, un mois après les attentats de novembre, une semaine après le second tour des régionales. Trois autres séminaires gouvernementaux s’étaient tenus en 2015.

Turquie : Erdogan dit à Ayrault de « se mêler de ses affaires »

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a demandé mercredi au ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault de « se mêler de ses affaires », dans une interview à Al-Jazeera. Le chef de la diplomatie française avait réclamé dimanche le respect de l’État de droit en Turquie, refusant tout « chèque en blanc » au président Erdogan, qui a lancé une vaste purge au lendemain d’un coup d’État raté. « Il devrait se mêler de ses affaires », a déclaré Recep Tayyip Erdogan dans une interview à Al-Jazeera.

Vaste purge

« Est-ce qu’il a l’autorité pour faire ces déclarations à mon propos ? Non, il ne l’a pas. S’il veut une leçon de démocratie, nous pouvons aisément la lui donner », a-t-il poursuivi. Jean-Marc Ayrault avait estimé qu’il « fallait condamner le coup d’État en Turquie, c’est la moindre des choses ». Mais « nous voulons que l’État de droit fonctionne pleinement, ce n’est pas un chèque en blanc pour Recep Tayyip Erdogan », avait-il ajouté. « Il ne faut pas faire de purges. Ceux qui ont porté atteinte à la démocratie doivent pouvoir être poursuivis dans le cadre de l’État de droit », a répété Jean-Marc Ayrault.

La vaste purge engagée en Turquie a suscité de nouvelles critiques mercredi du porte-parole de la chancelière allemande Angela Merkel, Steffen Seibert, selon qui « presque quotidiennement, de nouvelles mesures sont prises, qui sont contraires à un mode d’action respectant l’État de droit ». Le secrétaire d’État américain John Kerry a toutefois apporté le soutien américain à Recep Tayyip Erdogan, refusant de « commenter » les purges opérées par Ankara.

Mais où est donc passé le (vrai) maire de Nice ?

Qu’est devenu le maire de Nice Philippe Pradal ? Notre journaliste Emmanuel Berretta s’en inquiétait le 16 juillet en postant un message en forme d’avis de recherche sur Twitter.

On est toujours sans nouvelle du maire de #Nice, Philippe Pradal. Disparu du paysage sous le phénomène « éclipse Estrosi » #avisderecherche

— emmanuel berretta (@Eberretta) 16 juillet 2016

Christian Estrosi a été maire de Nice de 2008 à 2016, année où il est élu président de la région Paca et est donc rattrapé par la loi sur le cumul des mandats. Il démissionne et laisse son fauteuil de maire à son premier adjoint, Philippe Pradal. Ce Niçois pur jus est entré en politique sur la liste de Christian Estrosi et a été au conseil municipal. Il est également devenu, par la même occasion, secrétaire général de l’association des amis du maire. Un fidèle donc, qualifié par Nice-Matin, au moment de son intronisation à la mairie, d’« homme de l’ombre, discret, besogneux. Un calme pendant la tempête ».

FRANCE-ATTACKS-NICE © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT FRANCE-ATTACKS-NICE © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT
French Interior Minister Bernard Cazeneuve (C) arrives to speak to the media next to Mayor of Nice Philippe Pradal (L) in Nice early on July 15, 2016 as he visits the area where a truck ploughed into a crowd of people during Bastille Day celebrations. / AFP PHOTO / ANNE-CHRISTINE POUJOULAT © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT

La tempête c’était le 14 Juillet sur la promenade des Anglais. Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’« homme calme » est en effet très « discret ». Il apparaît en première ligne aux côtés de Bernard Cazeneuve et d’Adolphe Colrat, le préfet des Alpes-Maritimes. Mais cette nuit tragique et les jours suivants, le maire ne pipe mot. Silence médiatique. C’est son premier adjoint et mentor Christian Estrosi qui occupera la scène médiatique et alimentera la polémique sur les défaillances de l’État, selon lui, dans le dispositif de sécurité du feu d’artifice.

LIRE aussi Attentat de Nice : de nouvelles questions sur le dispositif policier

Il faut dire que l’ancien maire a fait de la sécurité la priorité de ses mandats, que sa ville est la plus vidéosurveillée de France. Mais les 1 250 caméras disséminées dans la ville devaient permettre à Estrosi d’affirmer au Point que les soixante-quatre policiers annoncés par l’État pour sécuriser la promenade n’étaient pas au rendez-vous. Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve lui répondait ce mercredi matin dans une interview au Monde. « Nous avons reconstitué la liste de tous les policiers nationaux qui étaient sur le terrain à partir des mains courantes attestant de leur engagement. Ils étaient quatre-vingt-cinq à 19 heures, quatre-vingt-neuf à 20 heures, quatre-vingt-douze à 21 heures et soixante-quatre entre 22 heures et 23 heures. Je tiens ce tableau récapitulatif des présences à la disposition de la justice. »

Bon, mais Philippe Pradal ? N’a-t-il rien à dire ? La réponse est dans Le Canard enchaîné, repérée par Le Lab d’Europe 1. Pradal n’a rien à dire, car, selon des propos qu’il a tenus à un de ses administrés, « c’est simple, je fais ce qu’Estrosi me demande. Et il ne me demande rien ». Il suffisait de demander.

Attentat de Nice : Estrosi en fait-il trop ?

Quelle mouche a donc piqué Christian Estrosi pour attaquer ainsi bille en tête les carences du gouvernement sur la sécurité, quelques heures seulement après l’attentat qui a frappé Nice ? Y voir une réaction émotionnelle du patron de la métropole azuréenne au drame qui a touché sa ville chérie, une défausse de responsabilité, une polémique politicienne, voire un positionnement tactique en vue de l’élection présidentielle, est un peu court.

LIRE aussi notre interview Estrosi : « Le gouvernement a menti ! »

Car le contentieux est bien antérieur à ce tragique 14 juillet. Il y a un an, presque jour pour jour, l’édile, dans ces colonnes, se plaignait déjà que l’État rogne des effectifs en matière de police et menaçait de faire appel à des vigiles privés. Ce qu’il a fait pour protéger la fan-zone de l’Euro, la ville de Nice ayant recouru à 124 agents de sécurité privée, installé à ses frais des portiques et dix caméras supplémentaires, bref, investi au total 1,2 million d’euros – près de la moitié du budget qu’elle allouait à la compétition – sur ce poste.

Pommes de discorde

Christian Estrosi et le préfet des Alpes-Maritimes, Adolphe Colrat, sont engagés dans un bras de fer qui dure. Il y a un mois et demi, dans un entretien qu’il nous avait accordé pour un numéro spécial Nice du Point, le premier ne mâchait pas ses mots contre le second, coupable à ses yeux d’être « favorable à l’ouverture d’un lieu de culte au bénéfice d’une mouvance salafiste [la mosquée En-Nour, NDLR]. Soit M. Valls accepte que son préfet ne respecte pas ce qu’il a affirmé, qui plus est en état d’urgence, précisait Christian Estrosi, soit le préfet exécute les instructions du gouvernement à l’encontre de l’intégrité du territoire national et de notre région. »

Objet du litige : l’installation de la mosquée En-Nour, contre laquelle bataille la municipalité, arguant du fait que ce bâtiment – que la ville veut transformer en crèche – est propriété du ministre saoudien des Affaires islamiques. Le président de la métropole niçoise a proposé l’ouverture d’un autre lieu de culte, mais le préfet a autorisé la mosquée En-Nour, et le Conseil d’État a tranché en sa faveur.

Ce n’est pas le seul litige qui oppose les deux hommes. Le baron niçois avait même demandé en octobre, lors des Rencontres de la sécurité sur la promenade des Anglais – propos rapportés par Nice-Matin – et sur Twitter, la tête du préfet, parce que celui-ci avait vertement critiqué sa gestion des rythmes scolaires. « Je ne suis pas en guerre contre le préfet, nous précisait Christian Estrosi en juin dernier. Je suis dans un rapport de force avec un gouvernement qui fait le contraire de ce qu’il dit. »

L’enjeu de la sécurité pour contrer le FN

Une opposition musclée qui s’est exprimée récemment aussi avec le logiciel de reconnaissance faciale mis au point par la métropole niçoise, et garantissant, selon son patron, qu’« aucune personne fichée S ne pourra circuler dans Nice sans être identifiée et neutralisée ». Le gouvernement n’a pas donné suite. « Je suis déçu par cette attitude peu responsable », lâchait Christian Estrosi au Point en juin.

L’homme, qui a fait de la sécurité un axe fort de sa politique, a toujours été un ardent promoteur des polices municipales. Celui qui est, par ailleurs, président de la commission consultative des polices municipales – auprès du ministre de l’Intérieur – se démène depuis longtemps pour accroître les moyens d’action de ces agents, notamment l’autorisation de leur armement. Il a fait de Nice une ville en pointe en la matière, ne cessant d’augmenter les effectifs des policiers et les dotant des équipements les plus modernes, en premier lieu un « centre de supervision urbaine » ultramoderne, pilotant 24 heures sur 24 les 1 250 caméras qui font de Nice la ville la plus vidéosurveillée de France. Et le politique n’a jamais hésité à faire des déclarations musclées sur le sujet.

Sur un territoire où le FN – dont des responsables ex-Identitaires – est en progression constante, les élections les unes après les autres se jouent sur cet enjeu. Et celui-ci, évidemment, après l’attentat du 14 juillet, structurera plus que jamais la vie locale et les scrutins, dans les prochaines semaines. Avec, au coeur du débat, des communautarismes exacerbés. En toile de fond, la bataille politique, à la lisibilité simple, entre un territoire de droite et un gouvernement de gauche, sans oublier le match picrocholin entre une grande métropole régionale – rattachée récemment (1860) à la France – et la capitale jacobine du pays. Et en ligne de mire, l’élection présidentielle de 2017.

Fenech : « Sous prétexte d’unité nationale, on esquive les vraies questions »

Le Point.fr : Considérez-vous qu’il y a eu un véritable manque de sécurité lors du feu d’artifice de Nice ?

Georges Fenech : Pour l’instant, il serait prématuré de se faire une idée précise. Concernant l’individu, on ne pourra jamais anticiper un acte isolé et spontané. Mais la question que je me pose, comme tout le monde d’ailleurs, c’est comment ce semi-remorque a pu pénétrer dans cette zone piétonne. C’est invraisemblable. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas eu plus de protection, car les barrières ne suffisent pas, on le sait très bien. Christian Estrosi a également pointé du doigt la faiblesse du système policier.

Si Christian Estrosi avait des doutes sur la sécurité mise en place, aurait-il mieux valu annuler l’événement ?

Non, je ne pense pas qu’il fallait annuler. Malgré les menaces, on n’a pas annulé les fan-zones ou le feu d’artifice à Paris du 14 Juillet.

En période d’état d’urgence, les grands événements comme ceux-là sont-ils souhaitables ?

Moi, j’étais plutôt pour l’interdiction de grandes fan-zones comme celles de Paris. On a pris beaucoup de risques. Heureusement, tout s’est bien passé. Mais nous savons très bien que les menaces sont toujours là. Il ne faut malheureusement pas croire que Nice sonne la fin des attentats. Il y en aura d’autres. Il faut véritablement prévoir des protections plus efficaces que celles qui ont été utilisées à Nice, c’est certain.

L’état d’urgence n’a plus d’intérêt, il ne nous protège plus

Vendredi soir, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve se sont contredits à propos de l’assaillant…

(Il coupe.) C’est pour cela qu’il faut être prudent quand on parle sur ce sujet. Tant que l’on n’a pas les résultats de l’exploitation de tout ce qui a été saisi à son domicile, il faut rester prudent. Je ne veux pas enfoncer le clou, la situation est difficile. Bernard Cazeneuve doit avoir moins d’informations, ou plus de prudence, que Manuel Valls. Évidemment, il vaut mieux parler d’une seule voix au sein du gouvernement, mais il ne faut pas en faire un plat.

Vous paraissez plus tempéré que certains de vos collègues de droite qui n’ont pas attendu bien longtemps après le drame pour s’en prendre au gouvernement… N’y avait-il pas là un manque de décence ?

Écoutez… Tout le monde a été extrêmement choqué par cet attentat d’un nouveau genre, qui est un carnage innommable. Les responsables politiques sont des hommes, et il y a un moment où l’on peut sortir un peu de ses gonds. Mais, oui, évidemment, ils doivent mesurer leur parole.

Cela dit, le gouvernement ne peut pas échapper à une critique. Ils sont dans le « bis repetita ». Le pouvoir nous sort exactement les mêmes réponses que le 16 novembre devant le Congrès : « état d’urgence », « force Sentinelle » et « accélération des frappes ». C’est bien la preuve que l’on est au bout du bout, qu’il n’y a plus aucune offre politique pour lutter contre le terrorisme. Par exemple, même si je le revoterai, l’état d’urgence n’a plus d’intérêt, il ne nous protège plus. Les perquisitions ne donneront pas plus que ce qu’elles ont donné jusqu’à maintenant… On ne lutte pas contre le terrorisme en faisant du flagrant délit, ce n’est pas vrai. Le travail doit se faire en profondeur.

Certains, comme Frédéric Lefebvre, préconisent même l’état de siège…

Non, non, mais après, on peut se lancer dans toutes les surenchères que l’on voudra, ça ne fera jamais avancer les solutions. Il vaut mieux en appeler au courage politique d’imposer des réformes absolument souhaitables. Non, il faut arrêter l’état d’urgence. Même la force Sentinelle n’a pas vocation à durer dans le temps.

Nos dispositifs doivent changer de nature, car nous ne sommes plus dans les schémas des années 80 où le terrorisme était localisé, identifié, revendiqué.

Vous avez déclaré qu’il fallait « tout revoir dans la lutte contre le terrorisme ». Qu’entendez-vous par là ?

Quand je dis cela, certains, comme Cambadélis, m’accusent de faire de la récupération sur le dos des victimes. Moi, j’ai plutôt le sentiment qu’on essaye d’esquiver de vraies questions, aussi sur le dos des victimes, sous prétexte d’unité nationale. J’ai l’impression qu’on veut bâillonner tous ceux qui ont des idées, et notamment ceux qui ont travaillé dans cette commission d’enquête pendant cinq mois. Il n’y a plus de débat. C’est la raison pour laquelle je dis qu’on est dans une forme de chute des responsabilités alors que l’on va aller vers plus d’attentats et plus de victimes.

Pendant cinq mois, nous avons réalisé une enquête très approfondie, avec l’audition des responsables de tous les services français et aussi européens. Nous avons rencontré nos homologues du renseignement à Ankara, à Athènes, à Bruxelles, à Tel-Aviv, à Washington… Nous sommes désormais convaincus que nos dispositifs doivent changer de nature, car nous ne sommes plus dans les schémas des années 80 où le terrorisme était localisé, identifié, revendiqué.

LIRE aussi Attentats : renseignement, terrorisme… Ce qu’il faut retenir du rapport de la commission Fenech

Vous semblez préconiser un véritable changement de paradigme ?

C’est évident. Il faut voir la réalité en face : nous avons des services qui ont des cultures remontant aux brigades du Tigre ! Nous ne sommes pas encore entrés dans le XXIe siècle. On n’ose pas toucher à l’existant, parce que cela heurte des prés carrés, cela heurte des cultures bien ancrées depuis toujours. C’est ce que nous dit Bernard Cazeneuve : il faudrait stabiliser l’état des réformes parce que nos services ne supporteraient pas un grand soir. Je suis désolé, mais ce sont quand même les représentants légitimement élus qui doivent impulser des réformes et qui doivent les imposer aux administrations. Voire changer les hommes à leur tête si ça ne suit pas derrière. Pendant ce temps-là, on a en face de nous des terroristes, des mafieux, des organisations du crime organisé qui se jouent totalement de nos faiblesses.

Quelles propositions faites-vous alors pour moderniser le logiciel ?

Nous avons mis la barre haut dans nos 40 propositions, car, avec Sébastien Pietrasanta, nous avons vite compris qu’il n’y avait plus d’autres alternatives. Nous devrions, par exemple, nous inspirer de ce qu’ont fait les États-Unis après le 11 septembre 2001 et commencer une restructuration en profondeur des services de renseignements. En France, ils détiennent chacun une partie des informations. Il y a, certes, des partages, mais ce que l’on demande, c’est une coordination au niveau du chef de l’État. Le ministre de l’Intérieur n’a pas autorité sur ses collègues les ministres de la Défense et du Budget… Nous demandons donc un véritable directeur national du renseignement avec une triple mission : le partage des informations, être capable d’analyser le niveau de la menace et être en capacité de mener une véritable stratégie de contre-terrorisme. Et, bien sûr, il faut aussi une base commune européenne : il est absolument nécessaire qu’Europol monte en puissance.

L’enquête de la commission n’a, semble-t-il, pas convaincu le ministre de l’Intérieur…

Nous avons l’impression que le pouvoir s’en contrefiche. Dès la publication de nos propositions, Bernard Cazeneuve nous a envoyés dans les cordes à l’Assemblée en parlant de nos mesures comme étant du « plum pudding », alors qu’il n’avait pas parcouru le dossier. Sébastien Pietrasanta, qui l’avait interrogé, s’est pris cela en pleine figure et l’a très mal pris. Le lendemain, Bernard Cazeneuve nous a reçus au petit déjeuner dans un souci d’apaisement, mais il a rejeté toute idée de réforme un tant soit peu profonde du système de renseignement. Il nous a même dit, avec une pointe d’humour, ou plutôt d’ironie : « Je souhaite bien du plaisir à mon successeur s’il veut se lancer dans cette aventure. » À partir de là, il n’y a plus de dialogue possible puisqu’on nous fait comprendre que c’est irréaliste et infaisable.

Le coiffeur de Hollande défrise les internautes

Depuis la publication par LeCanard enchaîné de la fiche de paie du coiffeur de François Hollande, les internautes s’en donnent à cœur joie. Rebaptisée promptement « CoiffeurGate », l’affaire truste le top des tendances sur Twitter depuis le début de la journée. Petit rappel des faits, Olivier B., coiffeur personnel de François Hollande à l’Élysée, touche 9 895 euros brut mensuels, soit autant qu’un ministre. Certes, ce dernier doit en contrepartie être totalement disponible, à toute heure du jour ou de la nuit. Mais cela fait tout de même cher le coup de peigne. Les réactions ont donc fusé. Festival.

Première tendance : les adeptes des jeux de mots. Sur le sujet, les possibilités sont nombreuses, et anonymes comme célébrités s’y sont risqués avec plus ou moins de bonheur.

#CoiffeurGate Un coiffeur à 10 000 euros, c’est le coup d’état permanente !

— lettotal (@lettotal) 13 juillet 2016

Les Français ne peuvent plus voir François Hollande en teinture. #CoiffeurGate

— Guillaume Meurice (@GMeurice) 13 juillet 2016

C’était donc ça la raie publique exemplaire ?#CoiffeurGatepic.twitter.com/PgCLcgaa63

— Karl Lactaire (@KarlLactaire) 13 juillet 2016

Deuxième tendance : ceux qui jugent qu’ils n’en ont pas eu pour leur argent…

On a vraiment dépensé 504 645€ pour ça @fhollande#CoiffeurGatepic.twitter.com/Vs1apQv1Ot

— Widad.K (@widadk) 13 juillet 2016

… Et qui, à ce prix-là, font quelques suggestions.

Quand tu demandes légèrement dégarni sur les cotés #CoiffeurGatepic.twitter.com/wJKoflk0fD

— Montreux Comedy (@MontreuxComedy) 13 juillet 2016

Si encore son coiffeur lui faisait une coupe sympa… #CoiffeurGatepic.twitter.com/TcSBZZsB6K

— Caillou Bijou (@HibouChouGenou) 13 juillet 2016

Enfin, il y a ceux qui rappellent que Hollande en la matière n’a rien inventé.

Petit rappel bien dégagé derrière les oreilles aux élus LR tentés d’en faire trop avec le #CoiffeurGate de FH.. pic.twitter.com/alnVfr092F

— Guillaume Blardone (@gblardone) 13 juillet 2016

Et ceux qui voient là une excellente raison de voter… Juppé !

«Le coiffeur de #Hollande est payé

9 895 euros par mois. Votez Juppé ! » #coiffeurGate

— C’est dit ! (@LecteursVDN) 13 juillet 2016

Emmanuel Macron avance vers 2017

Il n’est toujours pas officiellement candidat, pourtant Emmanuel Macron semblait bien être en campagne à la Mutualité (Paris) face à une salle comble. Mardi, lors du premier meeting de son mouvement En Marche! le ministre de l’Economie a assuré vouloir porter son mouvement « jusqu’à 2017 et jusqu’à la victoire ». « A partir de ce soir, nous devons être ce que nous sommes, c’est-à-dire le mouvement de l’espoir », a lancé Emmanuel Macron devant 3 000 militants et sympathisants réunis à la Mutualité. Ce mouvement, « nous le porterons ensemble jusqu’à 2017 et jusqu’à la victoire », a-t-il ajouté. Sommé ces derniers jours de clarifier sa position au sein du gouvernement, il ne s’est toutefois pas déclaré officiellement candidat à la présidentielle: « nous ne sommes candidats qu’à une chose, c’est porter un programme, c’est porter une vision, c’est changer le pays ».

Par ailleurs, il a assuré « être de gauche », tout en appelant à « dépasser les clivages » pour « créer un mouvement qui rassemble ». « Je suis de gauche, c’est mon histoire, c’est ma famille », a affirmé Emmanuel Macron en rendant un hommage à Michel Rocard, décédé début juillet, en présence de l’épouse de l’ancien Premier ministre socialiste. L’évocation de la figure de Michel Rocard a provoqué une ovation debout de l’assistance. « Une soirée comme ce soir, je peux pas ne pas penser » à lui, a souligné Emmanuel Macron, tout en se défendant de vouloir le « récupérer ». « On ne récupère pas Rocard, des gens ont essayé de son vivant ils n’ont pas réussi, bon courage pour le faire maintenant », a-t-il lancé, alors que le Premier ministre Manuel Valls a multiplié les hommages et s’est redit « rocardien » après le décès de l’ancien Premier ministre.

Il remercie François Hollande

Selon le fondateur du mouvement En Marche!, « il ne s’agit pas de dire qu’il n’y a pas de différence entre la gauche et la droite ». Mais « nous devons dépasser ce clivage, nous devons aller plus loin. Non pas pour former un nouveau parti » mais pour créer « un mouvement qui rassemble », a-t-il lancé. Il a remercié François Hollande de l’avoir nommé ministre de l’Economie, lors du premier meeting de son mouvement En marche!, alors qu’il venait d’être la cible d’une charge de Manuel Valls. « Le président de la République m’a fait confiance et je ne l’en remercierai jamais assez », a lancé le jeune ministre devant une salle comble à la Mutualité à Paris, sans faire aucune référence au Premier ministre. François Hollande « m’a fait confiance parce qu’il pensait que je pouvais faire quelque chose, (…) parce que j’aime mon pays, que je voulais agir », a-t-il poursuivi.

« Je ne veux pas d’une mode qui (…) consisterait à dire du mal du gouvernement ou du président de la République, ce n’est pas ma crémerie! » a-t-il encore assuré. Il a toutefois exprimé quelques critiques voilées, en parlant d’un pays « usé des promesses non tenues » et usé « de l’entre chien et loup ». « Ce que nous sommes en train de faire, c’est commencer à écrire une nouvelle histoire », a-t-il dit, saluant les élus venus le soutenir, qui ont « pris un risque parce que nous ne sommes pas toujours bien vus des partis ». « Alors cette histoire, elle dérange aussi. Ah oui! J’en sais quelque chose! » a-t-il lancé, sans toutefois aller jusqu’à nommer ces adversaires. « Ca va être dur demain, après-demain. Il y a aura de la pluie, des quolibets, des gens s’interrogeront sur nos capacités, notre volonté d’aller jusqu’au bout, mais rien ne doit nous arrêter », a-t-il poursuivi. A deux jours de l’allocution de François Hollande le 14 juillet et à neuf mois de la présidentielle, Emmanuel Macron réunissait son mouvement politique. Un premier grand meeting du ministre qui a suscité l’agacement profond de Manuel Valls: « Il est temps que tout cela s’arrête », a-t-il tonné mardi après-midi. Le Premier ministre avait déjà affirmé fin avril que c’était au président de la République de trancher sur le cas d’Emmanuel Macron.

Plaidoyer pour la laïcité

Le ministre a de nouveau marqué sa différence avec Manuel Valls en se disant défavorable à l’interdiction du voile à l’université proposée par le Premier ministre. « Je ne crois pas pour ma part qu’il faille inventer de nouveaux textes, de nouvelles lois, de nouvelles normes, pour aller chasser le voile à l’université, pour aller traquer ceux qui lors des sorties scolaires peuvent avoir des signes religieux », a-t-il dit. Mi-avril, dans un entretien à Libération, Manuel Valls s’était dit favorable à une interdiction du voile à l’université, en jugeant qu' »il faudrait le faire ».

Dans un volet de son discours où il s’est attardé sur la laïcité et l’identité française, deux thèmes chers à Manuel Valls, Emmanuel Macron a défendu des règles « qui sont claires: toutes les religions se conforment aux règles de la République ». « Dans notre République, il n’y a pas d’inégalités entre les hommes et les femmes. Dans notre République, il y a des règles, et elles doivent être acceptées par tous », a-t-il poursuivi. « Nous avons un ennemi, une menace, Daech (l’organisation Etat islamique), mais cela, ce n’est pas l’islam », a dit Emmanuel Macron, dans une nouvelle prise de distance avec le Premier ministre qui avait désigné « l’islamisme radical » comme « ennemi ». « La laïcité ce n’est pas un mot daté, ce n’est pas un mot ringard, elle protège des identités fermées, elle permet de veiller à ce que nul ne soit assigné à résidence par son identité et sa religion », a encore déclaré Emmanuel Macron.

Selon un sondage Odoxa pour Le Parisien publié mardi, 36% des Français souhaitent que l’ex-protégé du président se présente (30% chez les sympathisants de gauche, 53% de droite) contre 14% pour le président Hollande et 26% pour Manuel Valls.