François Fillon : un carnet d'adresses qui vaut de l'or

« Venons-en à ma société de conseil. J’ai exercé de 2012 à 2016 cette activité en toute légalité. […] La liste de mes clients ne comprend aucune entreprise russe, ni le gouvernement russe ni aucun organisme de ce pays et toutes les conférences que j’ai données en Russie l’ont été à titre gratuit. » Lundi 6 février, le candidat François Fillon se défend avec vigueur contre les mauvais procès qui, selon lui, lui sont faits.

Mais Le Canard enchaîné décidément ne lâche pas sa proie. Et la révélation du jour dans son édition datée du mercredi 22 mars écorne encore un peu plus l’image de François Fillon, déjà passablement abîmée. Selon l’hebdomadaire, François Fillon a touché 50 000 euros pour le compte de sa société 2F Conseil pour organiser en 2015 à Saint-Pétersbourg une rencontre entre son client Fouad Makhzoumi, qui détient une société d’infrastructures dans le domaine pétrolier, Patrick Pouyanné, le PDG de Total et… Vladimir Poutine.

L’hebdomadaire rappelle que Patrick Pouyanné fut naguère le directeur de cabinet de François Fillon lorsqu’il était ministre délégué des Postes, des Télécommunications et de l’Espace.

Certes, le gouvernement russe, comme le PDG de Total ne sont pas alors les clients de 2F Conseil. Poutine et Pouyanné apparaissent ici comme la marchandise fournie par l’ancien Premier ministre. Mais François Fillon a bel et bien monnayé son entregent auprès du chef de l’État russe. Une activité légale ? C’est ce qu’affirme avec force le candidat. Mais un dangereux mélange des genres pour qui aspire à servir l’État et incarner la France.

Liaisons dangereuses

Mercredi matin, Le Monde ajoutait de nouveaux éléments à ces informations du Canard. Le quotidien a aussi eu accès au contrat de lobbying signé entre 2F Conseil et Fouad Makhzoumi. Il est, écrit Le Monde, « assorti d’un objet dénué d’ambiguïté, qui tranche avec la mission d’intérêt général et la neutralité assignées aux élus de la République : exploiter, à des fins commerciales, le carnet d’adresses de l’ex-Premier ministre de Nicolas Sarkozy »

Le quotidien rappelle surtout le pedigree de l’entrepreneur libanais. Il a été impliqué dans un scandale de corruption en Grande-Bretagne, pour avoir recruté dans les années 80 un élu conservateur Jonathan Aitken, devenu ministre de la défense de John Major. Contraint à la démission en 1995, il fut condamné à de la prison ferme pour « parjure » en 1999. Et Le Monde de rappeler que François Fillon s’est rendu à Beyrouth pour rencontrer des chrétiens d’Orient en décembre 2014, invité par ce riche client.

Enfin, parmi les nombreuses sociétés off-shore ouvertes par Fouad Makhzoumi, l’une d’entre elles attire particulièrement l’attention. Domiciliée au Panama elle est coprésidée par le milliardaire libanais et deux proches du régime de Bachar el-Assad : « Salim Hassan, proche de Hafez el-Assad, le père de Bachar el-Assad, et Khaled Hboubati, un entrepreneur syrien resté proche de l’actuel président syrien », selon Le Monde.

« Faux et usages de faux »

Dans l’autre affaire qui empoisonne Fillon, le Penelopegate, Le Canard enchaîné et Le Monde nous donnent des nouvelles de l’enquête. Selon l’hebdo du mercredi, les enquêteurs soupçonnent les époux d’avoir fabriqué des faux. Ils ont mis la main sur une déclaration certifiant que Penelope ne travaillait qu’une trentaine d’heures à la Revue des deux mondes. Laquelle a été embauchée pour effectuer 151 heures. Seul hic, comme assistante parlementaire, Penelope Fillon était déjà censée travailler 151 heures auprès de son époux. Les deux emplois auraient donc excédé le maximum autorisé par l’Assemblée (180 heures).

Le Monde révèle en outre que les deux époux sont désormais sous le coup d’une enquête pour faux et usages de faux et escroquerie aggravée. Selon le quotidien, outre la fausse déclaration dont fait mention Le Canard, les enquêteurs ont saisi des « feuilles, signées par Penelope Fillon, [qui] comportaient différents calculs d’heures travaillées ». Des documents qu’ils soupçonnent d’avoir été fabriqués par les deux époux a posteriori.

Consultez notre dossier : François Fillon dans la tourmente