Florian Philippot : « Je ne connais pas l'histoire du Front national »

Les numéros deux du parti frontiste sont frappés par une terrible malédiction. Une calamité semblable à celle des malheureux explorateurs qui succombèrent les uns après les autres après avoir ouvert le tombeau de Toutankhamon en 1923. Comme dans la série de films cultes Destination finale, ils ont presque tous échoué à semer la grande faucheuse, qu’il s’agisse de leur existence politique ou, pire, de leur vie.

Deux d’entre eux ont trouvé la mort au sens propre : François Duprat, l’éminence grise nationaliste et révisionniste de Jean-Marie Le Pen dans les années 1970, a été assassiné. Une bombe a explosé dans sa voiture alors qu’il était au volant ; Jean-Pierre Stirbois, qui fut pendant huit ans l’organisateur en chef du parti, est également décédé en voiture. Il est mort dans un accident en 1988 alors qu’il revenait d’une réunion publique à Dreux.

« Le destin des dauphins est parfois de s’échouer »

Les autres sont toujours vivants. Mais ils ont presque tous été « tués » politiquement par leur chef. On peut citer Carl Lang, suspendu du FN en 2008 par le bureau exécutif pour s’être présenté aux élections européennes contre Marine Le Pen, parachutée dans sa région du Nord. Il y a aussi Bruno Gollnisch, le fils spirituel de Jean-Marie Le Pen. Le « Menhir » lui avait promis son soutien pour lui succéder à la tête du parti, avant de se ranger derrière sa fille lors du congrès de Tours en 2011.

La trajectoire la plus célèbre est peut-être celle de Bruno Mégret, le « félon » qui a provoqué une scission parce qu’il ne parvenait pas à convaincre Jean-Marie Le Pen de transformer le FN en parti de gouvernement. Plus récemment, en juillet, Louis Aliot, vice-président chargé du projet depuis l’élection à la tête du parti de sa conjointe Marine Le Pen, a été écarté au profit de Florian Philippot. Une succession de « mésaventures » que Jean-Marie Le Pen a résumées dans une de ces formules animalières dont il a le secret : « Le destin des dauphins est parfois de s’échouer. »

« Un côté gag »

« La malédiction a un côté gag. Mais il y a quand même quelque chose, abonde l’historien Nicolas Lebourg, auteur de Dans l‘ombre des Le Pen : une histoire des numéros 2 du FN. On ne peut pas critiquer le numéro un, donc le numéro deux sert de fusible. Il est là pour expier ses fautes. » Et d’ajouter une « blague maurrassienne » : « Si le FN perd trois fois, ça se jouera entre le numéro deux réel, Marion Maréchal-Le Pen, et le numéro deux légal, Florian Philippot. »

« En bon gaulliste, je ne suis pas là pour sacraliser les partis »

Ce dernier est-il conscient d’être à la place du mort dans la voiture frontiste lancée sur l’autoroute de la présidentielle ? Nous lui avons posé la question il y a quelques semaines. « La malédiction ? Ça fait vendre, c’est amusant. J’ai cru comprendre que, plusieurs fois, c’est parce qu’il y avait un conflit entre le un et le deux… » On le coupe : « Parfois, oui, mais, parfois, non. François Duprat, par exemple… » Il nous coupe à son tour : « Je ne connais pas l’histoire du Front national. Enfin, je connais vaguement son histoire par les médias. » Et de se justifier : « Un parti politique, c’est sympa, il y a des combats communs qui créent des liens évidents. Mais ça reste un moyen d’accéder au pouvoir. En bon gaulliste, je ne suis pas là pour sacraliser les partis. »