Marine Le Pen veut fédérer l'extrême droite européenne

La présidente du Front national français, Marine Le Pen, a prédit samedi, lors d’un congrès des droites extrêmes et populistes européennes, une révolte électorale cette année en Europe lors d’une série de scrutins cruciaux. Galvanisée par le Brexit et l’investiture vendredi de Donald Trump à la présidence américaine, Marine Le Pen a jugé qu’en 2017 les électeurs français, allemands et néerlandais pourraient « changer la face de l’Europe ».

« 2016 a été l’année où le monde anglo-saxon s’est réveillé. 2017 sera, j’en suis sûre, l’année du réveil des peuples de l’Europe continentale », a-t-elle déclaré à Coblence, en Allemagne, lors d’une réunion de partis membres du groupe Europe des nations et des libertés (ENL) du Parlement européen fondée en 2015. « Il faut passer à l’étape suivante, l’étape où nous ne nous contentons plus d’être une minorité au Parlement européen, l’étape où nous serons majoritaires dans les urnes à chaque élection », a proclamé celle qui, selon les sondages, est bien placée pour être au deuxième tour de la présidentielle du printemps en France.

Marine Le Pen a une nouvelle fois tiré à boulets rouges sur l’euro, la « tyrannie » de l’Union européenne, la politique migratoire de la chancelière Angela Merkel et salué Donald Trump et le choix des Britanniques du Brexit qui ont été érigés en modèle.

Anti-islam et anti-élites

Geert Wilders, chef du parti néerlandais anti-islam Parti pour la liberté (PVV), lui a succédé à la tribune sur le même ton. « Hier, une nouvelle Amérique, aujourd’hui Coblence, demain une nouvelle Europe (…) nous sommes à l’aube d’un printemps patriotique », a dit celui dont la formation pourrait arriver en tête des législatives de mars. Parallèlement, 3 000 manifestants, selon la police, se sont rassemblés pour dénoncer cette réunion.

Des effigies en carton d’Hitler et de Mussolini notamment ont été exposées et les protestataires, rassemblés sous l’œil vigilant de 1 000 policiers, ont brandi des pancartes barrées de slogans comme « celui qui dort en démocratie peut se réveiller dans une dictature ».

Le congrès de samedi était aussi l’occasion d’acter un rapprochement entre le FN et l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), jeune formation populiste anti-islam et anti-élites, qui est en pleine ascension électorale, en surfant sur les peurs générées par l’arrivée de plus d’un million de demandeurs d’asile depuis 2015. La figure montante du parti, Frauke Petry, a ainsi aussi sonné la charge contre l’Union européenne qui ne veut « plus de peuples, mais des populations ». Elle a aussi dénoncé « les centaines de milliers, les millions » de migrants « qui envahissent notre continent ».

L’AfD espère un score à deux chiffres lors des législatives du 24 septembre et priver Angela Merkel d’une majorité pour un quatrième mandat à la chancellerie. Son entrée à la chambre des députés serait une première pour un tel parti depuis la chute du nazisme.

L’extrême droite, toujours taboue en Allemagne

La réunion de Coblence, présentée par ses organisateurs comme un « contre-sommet » européen, a été l’occasion pour ces différents partis d’exprimer ensemble leurs ambitions et mettre en avant les thèmes qui les rapprochent. Mais pour l’expert du Fonds Marshall en Allemagne Timo Lochocki, ce congrès est destiné « à attirer l’attention des médias », plus qu’à fonder les contours d’une base programmatique commune. « Le fait que des gens votent ou non pour un parti d’extrême droite est lié aux spécificités de leur pays », dit-il.

L’organisation de ce congrès n’est pas allée non plus sans polémique en Allemagne où le discours d’extrême droite reste largement tabou du fait du passé nazi.

Au sein même de l’AfD, des cadres se sont désolidarisés de la participation de Mme Petry en raison de la présence de Marine Le Pen. Certains jugent la chef du FN trop « socialiste » sur le plan économique et d’autres trop sulfureuse. Le parti allemand s’est aussi retrouvé dans la tempête cette semaine lorsque l’un de ses responsables, Björn Höcke, a qualifié le mémorial de l’Holocauste à Berlin de « honte ».